Au matin du 2 septembre 1795, par vent faible E-S.E. et forte houle, la corvette « Assemblée Nationale » poursuivi par la frégate anglaise Diamond s’échoue sur les rochers des petits Renaud et coule. Revenons sur les circonstances de ce naufrage à travers les rapports de l’époque.
Procès verbal de la perte de la corvette
2 septembre 1795
Procès-verbal sur la perte de la corvette de la République L'Assemblée Nationale rédigé par Charles Cornic, contre-amiral, commandant les forces navales à Port Malo.
Aujourd'hui seize fructidor troisième année de la République Française une & indivisible
La corvette L'Assemblée Nationale, capitaine Corrouge, lieutenant de vaisseau, expédié de Brest pour Port Malo, ayant appareillé à trois heures environ du matin du travers de Port Blanc où elle avoit mouillé le soir pour passer la marée, continoit sa route le vent à l'Est Sud Est presque calme, lorsque sur les quatre heures, nous avons eu connoissance d'un bâtiment à trois mâts par notre derrière et au large de nous, que nous avons bientôt reconnu pour une frégate suspecte. Elle n'a pas tardé à nous apercevoir et de suite elle a tenu le vent pour nous appuyer la chasse. Nous avons songé de bonne heure à rallier la terre pour nous ménager une relâche si nous étions passés trop vivement par l'ennemi qui tomboit sensiblement sur nous. A six heures environ nous étions à l'ouvert du chenal de Tréguier et a porté de canon de la dite frégate qui s'est fait connoître en arborant pavillon et flamme anglaises et en nous envoyant sa volée à laquelle nous avons riposté par quelques coups de canon de retraite. Au même instant et donnant dans le chenal, remorqués par nos quatre embarcations, les vents nous refusant et la marée nous faisant dériver sur les pierres, nous avons touché, le pilote ayant prévenu d'avance le capitaine, qui lui a déclaré que, suivant ses instructions, il valoit mieux se livrer au […] que de laisser tomber la corvette au pouvoir de l'ennemi. […] après nous avons tombé sur les roches dites les Crubles situées au Nord Nord Est de l'Isle D'er alors l'eau affluant dans le bâtiments, le capitaine a fait gréer les pompes, mais bientôt il a été instruit et s'est convaincu que la corvette étoit crevée et couloit bas : aussitôt ordres de couper la mâture. Mais la corvette étant déjà submergée, il n'a pas été possible d'abattre le mât de misaine, les deux autres étant tombés : fait accoster les embarcations qui ont reçu à leur bord cent cinquante six hommes faisant partie de l'équipage du dit bâtiment nauffragé, d'après la liste que nous en avons prise après le sauvetage. Sur cette entrefaite la frégate
anglaise remit ses canots à la mer et ils ont nagé sur nous. A cette vue, nos embarcations ont poussé au large et sept ou huit hommes environ qu'elles n'avoient pu recevoir ont resté dans les haubans de misaine et sont tombés au pouvoir de l'ennemi. Nous avons encore la douleur de voir périr dans les flots le capitaine sus-nommé et le Citoyen Victor Meshier, officier de quart, avec quatorze hommes […] sans avoir pu leur porter les secours que nous désirions. Enfin ayant débarqué sur l'Isle d'Er, nos embarcations nous ont transporté à la pointe Saint Laurent, commune de Pleubian et y sont restés au nombre de quatre dont la plus petite appartenant au capitaine, sous la surveillance de la municipalité du dit lieu. De tout quoi nous avons rédigé sur deux feuilles de papier cotées et paraphées pour première et dernière page le présent procès-verbal dont nous avons tiré trois copies et signées individuellement par l'Etat-Major et l'équipage provenant de la dite corvette nauffragée.
A Pleubian le dit jour, mois et an que dessus. Signés Bodart, officier, Rogerie, officier, Sr Deny Trobriand, Lieutenant en pied, Artur Le Cov, pilote côtier, Addé, souschef civil, Quemper, officier et un grand nombre de signature des marins composant l'équipage de cette corvette.
Par suite du procès-verbal rapporté à Pleubian et consigné cy-devant, nous devons à la mémoire de notre capitaine et de l'officier qui a péri avec lui le [témoignage] éclatant qu'ils ont conservé leur poste jusqu'au moment où la violence de la mer […] enlevés malgré eux, ayant toujours donné leurs […] a engagé l'équipage à se sauver lorsqu’ils n'ont plus vu d'autres espoirs.
Nous devons encore représenter que le dénuement dans lequel leur nauffrage nous a laissé nous donne l'espoir les moins équivoques à la bienfaisance nationale. Nous ne doutons pas que les autorités supérieures ne s'empressent de nous assurer une indemnité proportionnée à la perte de nos effets dont chacun n'a pas même […] un vêtement pour se couvrir, observant qu'à la mer basse, la frégate anglaise qui avoit mouillé à demi portée de la corvette nauffragée avoit envoyé ses embarquations [….] piller les débris, ce qui nous a mis dans l'impossibilité de rien tenter pour le sauvetage des biens appartenant à la République ou aux particuliers. Signé Sr Trobriand
Correspondance officielle
2 septembre 1795
Lettre du maire de Paimpol au contre-amiral Cornic sur le naufrage de L'Assemblée Nationale
Je suis désolé de la perte du lieutenant Joseph Corrouge. Il est mort à son poste qu'il vouloit être le dernier à quitter. Il a conservé le sang froid et la plus grande fermeté jusqu'à la mort.
Ce matin, 4 heures, étant en calme le travers de l'Isle Dair, trouvant les vents à l'Est, il a vu au lever de la brume, une frégate anglaise qui avec une bonne brise de Nord lui tomboit rapidement sur le […]. Il avoit ses quatre embarcations dehors. Il ne pouvoit revirer au large sans tomber au pouvoir de l'ennemi. Il a voulu […] dans la rivière de Tréguier par une passe ou on dit qu'on lui a représenté qu'il y avoit du danger. Il a répondu qu'il ne livreroit jamais sa corvette à l'ennemi, qu'il préféroit de la perdre, qu'il falloit qu'elle passât ou qu'elle échouât. Elle a en effet échoué sur les Crubles. La majeure partie de son équipage s'est embarqué. On les invite à s'embarquer. Il a répondu que l'honneur et le devoir lui commandoient de ne s'embarquer que le dernier ? La corvette ayant versé, elle est remué à la bande et a démâté. Le démâtage l'a jetté à la mer. Un de ses officiers l'a tenu longtemps à flot, le tenant pat les cheveux et lui tenoit l'officier par une jambe. Mais il a dit à son officier en larguant sa prise, Sauve toi, mon ami, je ne veux pas te faire périr avec moi. L'officier a cependant voulu le retenir par les cheveux mais il ne lui est resté que son bonnet de police à la main et le pauvre Corrouge a disparu. Il a péri environ quinze à vingt hommes et six à sept restés à bord ont été faits prisonniers.
Les scélérats anglais ont eu la bassesse de tirer à boulets et à mitraille sur les chaloupes qui sauvoient le monde. S'excuseront-ils sur ce que la corvette échouée a tiré plusieurs coups de canon de retraite pendant qu'elle a été droit sur la roche, mais qu'après que son feu a cessé et qu'elle a tombé à la bande, quand enfin on a vu qu'on l'abandonnait, il y avoit de la lâcheté aux Anglais a continuer le feu. On a mesuré que jusqu'au moment ou le capitaine a tombé à la mer, il a conservé la plus grande fermeté et le plus grand sang froid.
Il est venu deux autres frégates se réunir à la première et mouiller au près. Leurs chaloupes ont été occupées à sauver des effets toute la marée basse.
Pour extrait conforme
[Signé] Cornic
Jugement
1795
La corvette L'assemblée nationale est partie le 9 fructidor an 3 de Brest pour se rendre à Saint-Malo.
Le 16 du même mois elle a été poursuivie par une frégate anglaise, et voulant éviter l'ennemi, elle a cherché un azile dans la rivière de Tréguier. En doublant les rochers dits les Cribles mais ayant été contrariée par un courant, elle n'a pu doubler, et ayant touché sur la pointe la plus Est des Crubles, qui se trouvoit couverte, elle a été déffoncée et submergée le même jour 16 fructidor.
Cette corvette étoit commandée par le lieutenant de vaisseau Corouge. Il y avoit de plus un autre lieutenant, trois enseignes, un instituteur et un aspirant, un pilote côtier, et les matelots en nombre suffisant.
Le 20 fructidor les officiers échappés au naufrage ont écrit une lettre au contre amiral Cornic au port malo pour l'instruire de cet événement fâcheux en lui envoyant le procès-verbal et deux certificats de la commune de Pleubian district de Pontrieux département des Côtes du Nord, qui constatent la bonne conduite de l'équipage.
Ces officiers dans cette lettre annoncent la perte du citoyen Corouge leur capitaine dont le sang-froid et le dévouement ne se sont point démentis jusqu'à la mort. Il n'a point voulu quitter la corvette et s'embarquer. " Mon devoir et l'honneur (a-t-il répondu) me forcent à n'en sortir que le dernier, sauvez vous, je suis à mon poste ". Lorsqu'il a été enlevé par la mer de dessus la corvette, un des officiers a cherché à le sauver, il a été soutenu quelque tems par les cheveux, et il se tenoit cramponné à la jambe de celui qui cherchoit à le retirer du naufrage, mais voyant qu'il faiblissoit, il a lâché prise, en lui disant, tu périrois avec moi, sauve toi mon ami, je ne veux par être cause de ta mort … et il a disparu à l'instant.
Il paroît d'après cette lettre, et les rapports fait dans la procédure que les anglais, au moment du naufrage de la corvette, ont eu la cruauté de tirer à boulet et à mitraille sur les canots qui cherchoient à recueillir les officiers et matelots de l'équipage de la corvette et les anglais étant restés deux jours dans les parages n'ont envoyé leurs chaloupes armées que pour enlever à marée basse tout ce qu'ils ont pu emporter, sans donner aucun secours aux naufragés.
Un autre officier avec quatorze hommes d'équipage ont péri sans qu'aucun ait été fait prisonniers.
Le 22 fructidor les officiers pour composer le jury d'accusation furent nommés et choisis, et le 23 le contre amiral Cornic leur a écrit pour connaître de cette affaire, et prendre les informations pour prononcer d'après la loi.
Le même jour 23 fructidor et jour suivant, le jury assemblé a interrogé tous les officiers rentrés, le pilote côtier, et plusieurs matelots de l'équipage, tous séparément ; leurs réponses sont conformes aux premiers rapports sur les divers points, tant du départ, que de la marche et enfin du naufrage de la dite corvette. Il a été prouvé que les évènements naturels ont forcé le capitaine à se retirer sur les côtes, que le pilote côtier la prévenu du danger en voulant doubler les rochers mais que ce capitaine a préféré échouer avec son bâtiment plutôt que de se rendre aux anglais, et qu'il n'y a eu dans sa manœuvre, ni impéritie, ni mauvaise volonté puisqu'il est démontré au contraire que le lieutenant de vaisseau Joseph Corouge n'avoit d'autre ressource pour échapper à la poursuite de l'ennemi que de manœuvrer pour entrer dans la rivière de Tréguier.
Le jury a déclaré en conséquence que tous les moyens ont été employés pour sauver la corvette L'assemblée nationale, que le lieutenant Corouge est devenu victime de son grand attachement au poste qui lui fut confié, et que la fermeté qu'il a montré doit lui valoir les regrets de tous les amis de a chose publique, que les officiers ayant été sous les ordres du citoyen Corouge jusqu'au dernier moment, n'ont fait qu'obéir, et ont contribué de tous leurs pouvoirs aux moyens employés pour sauver la corvette, que le pilote a rempli ses obligations en prévenant le commandant des risques à courir, en continuant la bordée de terre ; qu'ainsi les officiers et les membres d'équipage ne sont point coupables de la perte de la corvette L'assemblée nationale.
Le 25 fructidor, les officiers composant le conseil de justice assemblé pour prononcer suivant la loi du 22 août 1790, après avoir entendu les membres du jury d'accusation, ceux-cy retirés, le président a déclaré les enseignes de vaisseau Trobriand, Rogerie, Bodard, Quemper ainsi que le pilote Lacorre, non coupables du naufrage de L'assemblée nationale et les a déchargés d'accusation.
Revenons sur les circonstances de ce naufrage, la marée était en ce 2 septembre 1795 de vive-eau La pleine mer de port béni est à 07h51 (temps UT) coef 102 hauteur 10,04 m. Vers la 6 du matin le courant de flot sur le plateau des Renaud est particulièrement fort, Le vent E-SE est faible. Le capitaine le Lieutenant de Vaisseau Joseph Corouge, a une bonne expérience de la côte, il est de Bréhat. Il y a à bord un pilote côtier. La corvette Assemblée Nationale lorsqu’elle s’échoue sur les rochers est très proche du chenal d’accès de l’embouchure de la rivière de Tréguier. A peu de chose prés elle aurait pu échapper son poursuivant, la frégate anglaise ne se serait pas aventurer à la poursuivre entre les cailloux !
Une autre remarque, à quelques centaines de mètres du lieu du naufrage, un rocher dangereux le long du chenal se nomme la « Pierre L’anglais ». ce nom n’est pas lié à ce funeste épisode, il existait auparavant comme en témoigne une carte marine tracée avant 1785.
Ce qui a particulièrement choqué l’opinion public à l’époque est l’acharnement de la frégate anglais à l’encontre de la corvette naufragée. L’hatitude du capitaine Corouge fera de lui un héros de la marine révolutionnaire, il restera célèbre à Bréhat, et sur les côtes du Trégor et du Goélo
La corvette l’assemblée nationale
Cette corvette a une histoire originale. Ce navire, de grande marche fut construit en 1787 à Saint-Malo comme paquebot pour le gouvernement. Puis vendu à Lorient ou il fut armé comme navire négrier, sous le nom de « Assemblée Nationale » pour des expéditions de traite sur la côte du Mozambique en passant par l’île de France. Comme le prouve un état des vivres embarqués suivant daté du 23 janvier 1790 conservé aux archives départementale du Morbihan
« L’Assemblée Nationale est un navire de 240 tonneaux destiné à la traite des noirs. Il appartient et est armé par les sieurs Henry de La Blanchetais, père et fils, négociants et armateurs à Lorient.
Son capitaine est le sieur Courant. Fin janvier 1790, les armateurs et le capitaine embarquent des vivres pour la campagne.
Le navire quitte Lorient le 8 (ou 15) février 1790 pour le Mozambique en passant par l’île de France.
Il arrive à l’île de France le 16 mai 1790 et part du Mozambique le 12 octobre 1790.
Il débarque 300 noirs au Cap [Cap Français actuellement Cap Haïtien à Haïti] le 30 décembre 1790.
La date de retour à Lorient n’est pas connue [Mettas, Jean, Répertoire des expéditions négrières françaises au XVIII° siècle, tome second, Paris, 1984, pages 622 et 623]
En 1793, la France est en guerre contre l’Angleterre et l’état cherche à acheter des navires rapide. La corvette Assemblée Nationale est en vente.
Mais l’achat demande une expertise comme le montre les documents suivants
Lettre de l'ordonnateur de la marine au Havre au ministre de la marine concernant l'achat de deux navires corsaires
Au Havre le 21 avril 1793
Aujourd'hui je vais encore hazarder de vous faire la proposition de deux autres corvettes toutes armées et susceptibles de prendre la mer quinze jours après votre acceptation si elle a lieu. Si mon zèle pour la chose publique est encore déçu en cette occasion, j'aurai du moins pour moi le sentiment d'être irréprochable.
[En marge] 18 canons de 8
1° On offre à l'administrateur de la Marine le corsaire nommé L'Assemblée Nationale. C'est un des paquebots construit à Saint-Malo en 1787 pour le compte du gouvernement, il a d'excellentes qualités et est particulièrement connu pour avoir une marche supérieure. Il est cloué et chevillé en cuivre. La quille et le bordage en dessous de la flottaison […] sont en hêtre. L'Assemblée Nationale est très faible d'échantillon, mais sa membrure est parfaitement bonne. Ses hauts viennent d'être bordés à neuf.
Les armateurs ont fait une faute en la perçant pour 20 canons : elle ne devoit avoir que 18 sabords et si vous jugez convenable d'en faire un vaisseau de la République, il ne faudra lui donner que 18 canons. On peut croire qu'elle fera une excellente corvette quant aux qualités, et on doit en attendre encore 8 à 10 ans de service. Mais il pourra arriver qu'après quelques campagnes, il faudra peut-être diminuer son artillerie car elle n'a réellement que les dimensions d'une corvette de 6.
L’Assemblée Nationale n'a couté en 1787 qu'un peu plus de 150M[ille livres] prêt à prendre la mer. Aujourd'hui les armateurs offrent de la céder à la République pour 160 M[ille livres] en y accompagnant tous les objets d'un détail très considérable ont un très grand nombre d'entr'eux sont encore entre les mains des ouvriers. Le cuivre nécessaire pour son doublage est encore en magasin. (…)
Procès verbal de visite
1793, 30 mai
Procès-verbal de visite et estimation du bâtiment particulier L'Assemblée Nationale, armateurs les citoyens Henry père et fils
Proportions
Longueur absolue 100 pieds (32.48 m(
Largeur en dehors des membres 28 pieds 4 (9.22 m)
Creux de cale de vaigre sous bau 12…pieds (3.89 m)
Entrepont de planche en planche 5 pieds ( 1.62 m)
En conséquence des ordres du citoyen ordonnateur de ce port, nous sous-chef des travaux et officiers attachés aux mouvements des ports, nous sommes transportés à bord du dit navire L'assemblée nationale et ayant visité avec son toutes les parties de la coque, mâtures, gréement, aparaux, voilure et tous les articles portés sur l'inventaire, pour en conclure leur estimation, pensons que ce bâtiment construit en 1789, qui nous a paru généralement bon et bien conditionné dans ses liaisons, et susceptible par sa forme et la force de son échantillon d'être armé en guerre comme corvette, en lui rasant ses gaillards pour lui faire une batterie à barbette de l'avant à l'arrière, doit valoir ainsi qu'il suit.
Coque. En raison des circonstances et des qualités reconnues du dit navire, ensemble ses battaux, fours, cuisines et le tout estimé au 1/5 usé la somme de …....................................................65 000 [livres]
Mâture. Faite en 1789 ; les mâts majeurs visités et réparés tout récemment ; la drôme dans le cas de quelques changements et réparation, ensemble hunes ; barres, chouquets le tout au 1/3 usé …...........................16 500 [livres]
Doublage en cuivre. Ayant fait deux voyages à l'isle de France a besoin d'être levé pour visiter les coutures, clous et chevilles du franc-bord, estimé au 1/3 usé ; ensemble les […] en fonte, tuyaux de pompe, pompe à laver en cuivre, plus deux grandes chaudières avec leur cuillers dans l'état où se trouvent les divers objets …................ 17 340 [livres]
Gréement et aparaux. Cables, grelin, manœuvres dormantes et courantes aux 3/4 usé ; rechange 1/4 usé ; caps de moutons et poulies de toutes sortes au […] usé ; ancres sur le pied de 12 sols la livre le tout ensemble la somme de …................ 16 600 [livres]
Voillure. Estimée aux 3/5 usé la somme de ...... 8 000 [livres]
Futailles. 312 barriques à eau en pièces simples, pièces de 2, de 4 et de 6, à condition quelles seront remises en état, estimées au 1/3 usé.................................... 4 680 [livres]
Lest. Consistant en 10 900 livres de vieux boulets, 3000 livres en quatre obusiers de 12 (à moins que d'après une visite scrupuleuse les dits obusiers ne se trouveront bons) et 50 728 livres en gueuses, le tout ….........................7 470 [livres]
Articles des différents maîtres, ainsi qu'ils sont portés dans l'inventaire et dans l'état où ils se trouvent ensemble …..........6 000 [livres]
Valeur totale ….........................141 590 [livres]
Nota. Ne sont point compris dans notre estimation les articles du maître d'hôtel et chirurgien, ainsi que les vivres de retour, comme objets de peu d'utilité pour le service de la République.
Que reste-t-il de l’Assemblée Nationale ?
Suite au naufrage les anglais se la frégate Diamond se rende à bord à basse mer et pillent ce qu’ils peuvent , par la suite en 1800 des canons ont été repêchés par Le Goïc, négociant à Brehec.
Plus de deux siècle après ce naufrage, en 1998 l’épave a été redécouverte par des plongeurs locaux, Daniel David et Dominique Le Creurer Je site intégralement la description de l’épave du site Atlas une base de données des épaves du ponant
« L'épave se situe au pied de la façade nord des roches des Crubles ou Petit Renauds. Les vestiges se dispersent sur un grand massif rocheux submergé couverts de laminaires. Aucune trace de bois et aucuns vestiges de coque n'ont été décelés.
Mobilier mis à jour : 1 cheville en bronze (L : 0,70 m, poids : 2 kg), 2 poids en plombs tronconiques (poids :1,350 kg et 2,05 kg), 1 disque en plomb (diam. 10,5 cm, poids : 0,650 kg), 1 coude de tuyau en cuivre (diam. 4 cm), 1 bille percée (diam. 2,8 cm), 1 boucle en cuivre, 1 manche de cuiller en étain, 2 objets en bronze épais avec collerette (poids : 2,2 kg), 1 objet en cuivre en forme de U (poids : 0,130 kg), des clous en cuivre, des fragments de plaques de plomb et de feuille de doublage en cuivre, 4 fragments de cloche sans gravure (diam. supposé 40 cm, poids : 13,4 kg), 2 plombs de sonde à facettes en excellent état (poids : 10 kg et 18,4 kg), 1 bouchon en laiton (diam. : 3 cm), un fémelot en bronze (0,78 m de long, poids : 17 kg), un aiguillot (0,78 m de long, poids : 16 kg)
Mobilier présent sur le site : 7 canons en fer (dont 4 mesurés : un de 2,35 m, deux de 1,65 m et un de 1,75 m), boulets de 9,5 cm de diamètre, 1 perrier en fer enfoui sous les laminaires, gisement de gueuses en fer, 3 ancres, 1 grande feuille de doublage en cuivre coincée dans les roches.
En 2008, un fragment de cloche sans inscription de 4,340 kg et un lingot de plomb en forme de coque de bateau d'un poids de 2,250 kg ont été prélevés »
Jean Boudriot, a fait l’étude d’un navire négrier de la fin du XVIIIème, dont un a publié la monographie de édition Ancre : Monographie de l’Aurore
Assemblée Nationale bien que plus petite devait être proche de ce navire tant par ses formes, son aménagement et son gréement.
L’association, Le bateau pédagogique, travaillant sur la mémoire de la traite des noirs a le beau projet de reconstruire un navire négrier de cette époque en partant des plans de l’Aurore. Ce navire passera peut être un jour au large des côtes du Trégor en évitant, bien sur, les rochers du plateau des Renaud.
Sources et liens
Cet article est principalement basé sur les données sur l’épave de l’Assemblée Nationale de La base de données Atlas archéologique des biens culturels maritimes de l'Arc atlantique
Mais aussi sur : Batailles maritimes de la France par O Troude 1867
Livres de bord de navires négriers au XVIIIème
Nous allons découvrir, l’attaque du cotre le Printemps, sous l’Empire à l’époque ou la Marine organisait des convois de caboteurs pour avitailler Brest.
Par Édouard Corbière dans « La mer et les marins » 1833
Combat du côtre le Printemps
et de douze péniches anglaises
J’étais sur un côtre de l’État, de 14 petits canons. C’était en temps de guerre. Nous escortions vers Brest, avec deux canonnières, un convoi de caboteurs disséminés ça et là, et se cachant dans les cailloux et presque sous les roches, de peur des croiseurs anglais, vautours insatiables, fondant impitoyablement sur tout ce qu’ils apercevaient au milieu de ces mers, devenues leur domaine.
Les soir, un soir d’hiver, se faisait avec ce calme houleux qui a presque l’air d’une tempête. Nous avions allié, avant la nuit, tout notre petit convoi, pour l’envoyer mouiller ou plutôt coucher au Conquet, sous les batteries de la côte. On aurait dit, en voyant notre côtre le Printemps rassembler les navires confiés à sa garde, d’une poule qui cherche à réunir sous son aile maternelle tous ses poussins épars.
A six heures du soir notre convois était ancré paisiblement à terre de nous, les deux canonnières embossées entre le côtre et nos caboteurs. Comme chef de ce troupeau de navires, nous avions pris la tête de la ligne : le commandant des convoyeurs du Nord avait placé son pavillon à notre bord.
Après le souper de l’équipage, le maitre descendit dans la chambre, le chapeau bas et le sifflet au côté :
- Capitaine, dit il, fera-t-on les filets d’abordage, ce soir ?
- Oui, répond le capitaine. Quoique la division anglaise soit loin, il est bon de prendre nos précautions..
- Pourquoi faire vos filets, capitaine ? ajoute le commandant du convoi. Cette nuit, nous appareillerons à la marée, et ce serait donner à l’équipage la peine de les amemener.
- Cela ne fait rien, commandant ; ce sera un petit travail de plus, mais nous dormirons plus tranquilles.. Oui, maitre, faites faire les filets.
Cet ordre prudent nous sauva.
Une fois les filets d’abordage dressés au-dessus des bastingages, la bordée de quart se mit à se promener sur le pont du côtre, comme des oiseaux dans une volière ; car c’était bien une véritable volière que ce petit bâtiment entouré de ces hauts filets, qui ne ressemblaient pas mal à un grillade de fil de laiton. Il faisait froid, nous étions au mois de décembre, et les pieds des gens de quart frappaient régulièrement de leurs pas sonores le pont qui recouvrait les hamacs des hommes endormis jusqu’à minuit. La mer était calme et l’air si tranquille, qu’on entendait du bord la voix solitaire des factionnaires de la batterie du Conquet, crier à chaque heure : Sentinelle, prenez garde à vous ! Mais l’obscurité était telle, que nos hommes avaient peine à se reconnaître à la figure, à deux pas de distance les uns des autres.
Minuit approchait : minuit ! heure si désirée par ceux qui doivent réveiller la bordée de quart !... C’est, dit on , à terre, l’heure des amants : à bord, c’est aussi celle du bonheur pour ceux qui ont pris le quart avec une nuit qui semble ne vouloir jamais finir.
Un commis aux vivres, un de ces hommes qui à bord font le quart de M. l’abbé, comme disent les matelots, s’avise de quitter sa fumeuse cambuse pour monter sur le pont, en amateur. C’était la Providence qui, sans qu’il s’en doutât, le pauvre homme, le conduisait là, pour nous, pour l’honneur du pavillon et le salut du convoi.
Le cambusier, en humant l’air libre et frais qu’il est venu chercher, s’amuse à porter les yeux, qu’il se frotte encore du dos de la main ; autour de lui : il ne voit d’abord rien, mais il lui semble entendre au large un léger bruit de rames, qui fendent la mer avec précaution, avec mystère, avec une sournoise intention ; il court devant. Il demande aux hommes de bossoir s’ils n’entendent rien, s’ils ne croient pas apercevoir quelque chose… là… plus loin encore … là enfin ?... Les hommes de bossoir se courbent, abaissent le sourcil, étendent leurs regards rôdeurs sur la mer unie, qui se confond avec les ténèbres… Ils ne voient rien… Silence ! crient-ils aux gens qui se promènent… Les gens s’arrêtent ; ils se taisent, retiennent leur haleine… Tout le monde écoute, prête l’oreille, ouvre bien encore les yeux… On n’entend rien !... le pilotin passe devant en bâillant, et va frapper huit coups à la cloche : c’est la fin de la longue veillée, c’est minuit ! Réveille au quart ! Commande l’officier ; réveille au quart ! Répète le maître. En haut, les bâbordais ! disent les tribordais… Non ! Non ! s’écrie comme un inspiré notre cambusier, que nous avons oublié, et qui s’est tenu collé au bossoir. Non ! Non ! Tout le monde sur le pont ! Aux armes ! Aux armes ! Voilà les péniches !
On n’a pas le temps de s’armer : Les péniches anglaises, arrêtées à une petite distance du bord, pour profiter du moment de confusion du changement de quart donnent un dernier coup d’aviron ; un effroyable hourra est poussé : les péniches volent ; elles sont le long du bord. On Saute aux pièces, on demande des fusils, des haches, des mèches allumées. Les hommes couchés s’élancent sur le pont. On se heurte, on crie, on met enfin le feu aux pièces : les premier armés font feu par les sabords. Les anglais grimpent dans les filets, le pistolet au poing ; il tirent : on leur lance des coups de pique, ils tombent ; quelques-uns se jettent à bord par un trou qu’ils ont fait en coupant les filets du travers. Les coups de sabre voltigent ; on, se hache sur le pont, sans savoir sur qui l’on frappe. Une des canonnières mouillées à terre du côtre se halle à pic sur son câble, et son capitaine hèle au porte-voix : Oh ! du Printemps ne tirez plus du coté de bâbord, vous allez nous couler ! et puis cette canonnière, dépassant le côtre de toute sa longueur, envoie une bordée terrible aux péniches, qui se halent en désordre sous notre beaupré. A la lueur du feu de la canonnière, nous avons vu les anglais perchés sur leurs bancs !... On se bat encore sur le pont du côtre ; mais dans l’intervalle des coups de feu, on entend le bruit des avirons qui tombent régulièrement sur l’eau, qu’ils fendent à coup pressés : ce sont les anglais qui s’en vont. Le capitaine crie tant qu’il peut : « Ne frappez plus ! ne frappez plus ! allumez les fanaux ! » Il était temps. Les hommes du côtre se massacraient entre eux, croyant abattre des ennemis. En allant chercher du feu à la cuisine et à l’habitacle pour les fanaux, nous autres petits pilotins, nous tombons sur des cadavres qui nous barrent le chemin. On se relève, les mains gluantes de sang ; enfin, les fanaux viennent. On relève dix à douze blessés, cinq à six morts. Trois anglais hachés sont reconnus : ils portent au bras une bande de drap blanc, qui devait leur servir de reconnaissance pendant la mêlée. On les panse, on les interroge. L’un d’eux, qui malgré ses onze blessures, peut encore parler, nous apprend que douze péniches nous ont abordés, et que sans nos filets nous eussions été enlevés en quelques minutes ! Notre capitaine, pris corps à corps par ce dernier assaillant, lui avait traversé la poitrine d’un coup de pistolet à bout portant, cependant parlait encore.
La plus complète tranquillité succéda à cette attaque de nuit. Les commandants des forts et des canonnières se rendent à notre bord : on se félicite, on s’embrasse sur ce pont encore tout ensanglanté. Le lendemain au matin, l’ordre d’appareiller est donné, et le jour enfin se fait. Nous l’attendions bien impatiemment ce jour, pour contempler avec curiosité le théâtre de notre combat nocturne. Le côtre se trouva noblement environné, au lever de l’aurore, de débris d’embarcations, de chapeaux de marins, percés de biscaïens, d’aviron brisés, éparpillés ça et là sur les flots, où l’on croyait apercevoir de larges taches rouges… Nous appareillâmes avec notre convoi, que nous conduisions tout glorieux, un large pavillon tricolore à notre pic. En doublant la pointe saint-Mathieu, une longue et noire frégate anglaise, détachée de la division qui croisait au large, parvint, en louvoyant à toc de voiles, à s’approcher de nous. Notre petit Branle-bas de combat était fait à bord, protégés que nous étions sous les hautes batteries de terre. La frégate nous rallia à demi-portée de canon, mais sans nous envoyer un seul boulet. Elle semblait, avec inquiétude, chercher à voir si nous avions pris quelques-unes des péniches : plusieurs d’entre elles avaient sans doute manqué au rendez-vous. La frégate parut ne pas vouloir se venger de notre succès, car elle était bien près, bien terrible, et elle ne répondit portant pas aux batteries de la pointe Saint-Mathieu, qui déjà faisaient gronder leurs lourdes pièces de 36. En virant de bord, pour s »éloigner, elle nous laissa lire distinctement à la longue vue, sur son vaste arrière, ce nom écrit en lettre blanche : Cornélie.
Le soir, nous avions déjà débarqué tous nos blessés à l’hôpital de la marine de Brest. Le lendemain, nos morts furent ensevelis dans notre grand pavillon, et enterrés avec pompe dans le cimetière de la ville. Les blessés qui purent se trainer à terre, suivirent le convoi.
J’avais neuf à dix ans. A cet âge, on a tout ce qu’il faut pour recevoir les vives impressions, qui se gravent pour jamais dans une mémoire fraîche et une imagination facile à impressionner : jamais aussi je n’oublierai ces grands anglais que je vis grimpés, comme des fantômes de nuit, dans les filets d’abordage du côtre le Printemps.
Edouard Corbière
Récit de Fulgence Girard et Jules Lecomte dans les « Chroniques de la marine française de 1789 à 1830» édité en 1837
« Ce navire était sorti de Saint-Malo, ayant sous sa protection et celle de deux chaloupes canonnières, un convoi de vingt-cinq voiles en destination de Brest. Durant la nuit du 30, cette petite flotte côtoyait la plage bretonne, espérant que l’obscurité déroberait son passage à la vigilance des avisos et des croiseurs anglais. Son espérance fut trompée ; le commandant de l’escadre britannique devant Brest, averti, par l’une des mouches qu’il lançait dans toutes les directions, de la marche nocturne du convoi, détacha sept péniches armées pour s’en rendre maîtresse. Ce fut sur le cutter que porta presque exclusivement l’attaque. Le Printemps est abordé, et un instant après, malgré la belle résistance de son second, le bord est envahi, un combat acharné se livre sur son pont ; l’équipage, retiré vers l’arrière, oppose aux anglais une résistance que chaque instant rend plus meurtrière. Le premier succès remporté par l’ennemi n’a point assuré son triomphe. Au feu des pistolets et fusils a succédé une lutte corps à corps ; on se sabre, on se perce, on se hache ; l’ennemi enfin, rejeté dans ses embarcations, déborde et prend le large. Le feu combiné du cutter et des chaloupes canonnières le place sous un nouveau danger ; les boulets et les mitrailles ne cessent de le poursuivre que lorsqu’il est sorti de la portée des pièces. »
Rapport du Capitaine de Frégate François Guéguen directeur des convois de la manche en annexe dans les « Chroniques de la marine française de 1789 à 1830»
« Monsieur le Préfet
J’ai l’honneur de vous rendre compte que ce jourd’hui 30 janvier 1807, environ vers les neuf heures et demie du soir, ayant appareillé, quoique le temps fût très obscur, dans l’intention de me rendre à Brest avec un convoi de vingt-cinq voiles venant de Saint-Malo sous l’escorte du cutter le Printemps, commandé par M. Bigeault aîné, lieutenant de vaisseau, et les chaloupes canonnières n°22 et 21, le cutter particulièrement a été attaqué par sept péniches anglaises envoyées par les vaisseaux et corvettes de la station de Brest qui, après l’avoir abordé, ont mis à bord la presque totalité de leurs équipages, armés de pistolets, sabres et piques, dans le dessein de l’enlever, et par conséquent, de s’emparer du convoi ; mais la vigoureuse résistance qu’on leur a opposée dans un combat très vif qui a duré trois quarts d’heure, pendant lequel deux hommes du Printemps ont été tués et dix grièvement blessés, les a forcés de gagner le large, après avoir perdu la majeure partie de leurs équipages par abordage et le feu bien combiné des canonnières et du cutter, qui n’a cessé que lorsque l’ennemi a été hors de portée de canon.
Je n’ai qu’à me louer, dans cette occasion, de la conduite distinguée qu’ont tenue, pendant toute l’action, me lieutenant Bigeault et l’enseigne Frégot, qui s’étant élancé sur le point ou s’embarquait l’ennemi, a culbuté plusieurs assaillants à la mer, et défendu quelque temps seul cette partie du bord
Le Capitaine de Frégate, directeur des convois de la Manche
Signé GUEGUEN
Commentaires :
La confrontation de ces trois sources est passionnante. Le récit de Corbière est, bien sur, le plus vivant, décrivant admirablement, en marin l’action à bord, mais certainement le plus approximatif. Il est entièrement basé sur ses souvenir de jeunesse lorsqu’il était mousse sur cotre le Printemps. En janvier 1807 Édouard Corbière a 13 ans et non 9 à 10 ans comme il le raconte , il y est embarqué à bord du Printemps à la surveillance des convois depuis 1806 et c’est certainement son premier véritable combat. On comprend bien qu’il fut particulièrement impressionné par cet abordage de nuit suivi d’un combat au corps à corps sur le pont du navire .
Cornélie est le nom d’une frégate française de 44 canons, capturée par les espagnols le 14 juin 1808 et rebaptisée Cornelia. Une autre frégate anglaise de 32 canons ne nommait Cornelia, elle fut lancé en 1808
Le cotre le Printemps fut construit en 1793 à Cherbourg, commencé 03 1793 mis à l’eau 07 1793 retiré 19 07 1815. Ses caractéristiques étaient déplacement 80t ; longueur 19,5m, bau : 6,5 m tirant d’eau : 3,3 m armement 12 canons.
Sur ce combat du 30 janvier 1807 des questions restent ouvertes :
Ou se passe exactement l’action ? Corbière la situe au mouillage au Conquet, le rapport de Gueguen laisse entendre que les navires naviguent de nuit profitant de l’obscurité. On peut supposer que le cotre naviguait dans le chenal du four car les péniches sont envoyés depuis les navires assurant le blocus de Brest.
Combien de péniches anglaises ont attaqué le côtre ? Corbière en dénombre 12, Guéguen 7.
Combien de victimes anglaise ? Je n’ai pas trouvé de document anglais retraçant ce combat.
Des anglais ont-ils été fait prisonnier lors de ce combat.
Une recherche complémentaire au service historique de la défense au château de Vincennes nous apportera peut être des nouveaux éléments.
En 1794 la France de Convention nationale est en guerre contre presque tous les pays d’Europe. En avril 1792 la France est en guerre contre la Prusse, l’Autriche et la Sardaigne. En février 1793 la France déclare la guerre aux deux puissances maritimes : la Hollande et la Grande-Bretagne. La marine française est complètement désorganisée. En 1793 et au début de 1794, à part quelques escarmouches il n’y a pas de véritable engagement maritime entre les puissances en guerre.
On peut considérer, ce combat du 20 avril 1794, entre frégates françaises et frégates anglaises comme la première bataille navale d’une période d’affrontement qui dura plus de vingt ans. Ce combat devance de quelques semaine la terrible bataille du 13 prairial de l’an II de juin 1794 qui sera une bataille navale d’une toute autre dimension à l’ouvert de la Manche.
En avril 1794, une escadre légère anglaise croise en Manche dans le but d’intercepter les navires marchand Français. Cette escadre, commandé par le commodore Sir John Borlase Warren, est composé de 5 frégates : le HMS Flora de 42 canons, une des meilleurs frégates de la Royale Navy, de HMS Arethusa une frégate de 44 canons, de HMS Melampus frégate de 42 canons, de HMS Nymphe frégate de 40 canons de HMS Concorde frégate de 42 canons, la Concorde fut prise au français durant la guerre précédente en 1783, la Concorde construite en 1777 à Rochefort est la sœur en construction de l’Hermione.
En même temps une escadre légère de frégates française croisent également en manche sus au navire marchands anglais.
Cette escadre sous le commandement du capitaine de vaisseaux Desgarceaux est plus faible que l’escadre anglaise elle est composé de la frégate Engageante de 36 canons commandée par Desgarceaux, de la frégate la Pomone de 44 canons commandée par le lieutenant de vaisseau Prévieux de la frégate la Résolue commandée par Puillon-Villéon et de la corvette le Babet commandée par l’enseigne de vaisseau Belhomme
Le 21 avril, cette escadre est au mouillage à Cancale, le 22 elle appareille en direction de Cork.
Le 23 avril vers 4 heures du matin, l’escadre française aperçoit une frégate anglaise, Desgareaux ne voyant pas l’ensemble de l’escadre anglaise ne se rend t-il pas compte que la puissance de feu anglaise est supérieur ou contraint par un vent faible de sud, il ne choisit pas la fuite face à cette escadre le combat est la seule issue.
Les deux escadres se préparent au combat. Les frégates anglais prennent la position au vent de l’escadre française, ce qui les avantage.
Voici le récit du combat publié en 1869 dans « Histoire des marins français sous la République, de 1789 à 1803 » de Rouvier
« la brise soufflait toujours du sud-est, et le feu commença pendant que Desgareaux courait une bordée dans l'est. Il reprit ensuite les amures à bâbord. Les Anglais imitèrent sa manœuvre en conservant l'avantage du vent, et le combat continua sous l'allure du plus près, en ligne de bataille, bâbord amures.
La Résolue, qui marchait en tète, se trouva souventée dans une position si désavantageuse, que ses boulets tombèrent parfois à bord de l’Engageante. Lorsque Puillon-Villéon reçut l'ordre de forcer de voiles, il tomba plus encore sous le
vent, et quand on lui signala de prendre poste entre l'Engageante et la Pomone, il n'en fit rien, donnant pour raison que sa frégate avait éprouvé de grandes avaries.
Cependant, de part et d'autre, le feu continuait avec vivacité, et la Pomone, en particulier, soutenait une lutte héroïque.
Après une heure et demie de canonnade, Desgarceaux reçut une blessure mortelle, ce dont les officiers prévinrent immédiatement Puillon-Villéon; mais ce dernier, jugeant la position désespérée, força de voiles pour s'éloigner du théâtre du combat, en hissant le signal de suivre son mouvement.
Déjà il était certain que la Pomone et la Babet devaient succomber, parce que ces deux bâtiments étaient cernés par les frégates ennemies.
Pourtant les marins se battaient avec acharnement; les cris de Vive la République! retentissaient dans les batteries. Pévrieux, quoique blessé, ne voulut pas quitter son
poste, et ne cessa d'encourager ses hommes. En ce moment, la Pomone était canonnée par Arethusa, qui se maintenait à portée de pistolet; la Flora, la Melampus, une quatrième frégate ennemie l’écrasèrent de leurs volées; bientôt le grand mât de notre frégate chancela; la vergue de misaine ayant eu ses suspentes coupées, tomba sur le gaillard d'avant; les caronades furent démontées, 60 hommes tués ou blessés.
Pévrieux ordonna d'évacuer les gaillards pour compléter les armements des pièces de la batterie. Peu après, un boulet enflammé de Arethusa mit le feu à la hune d’artimon,
d'où il se communique au gréement avec tant de violence, que le mât ne tarda pas à tomber avec fracas.
Ce fut alors que l'intrépide capitaine, certain qu’il était abandonné, amena le pavillon national, amarré depuis longtemps aux haubans de misaine. Cette lutte inégale avait duré plus de trois heures et demie, et les Anglais ont rendu pleine justice à la valeur de nos marins.
L’Engageante fut réduite également, après une chasse de plusieurs heures. Le lieutenant Le Maître n'amena son pavillon qu'à 2 heures 30 minutes de l'après-midi, ayant épuisé toutes ses munitions. Le grand mât de hune, le mât de perroquet de fougue étaient brisés; la cale pleine d'eau; 29 hommes tués ou blessés. Peu de temps après, tous les mâts tombèrent. Le Maître, en donnant des éloges mérités à ses officiers et matelots, se répandit en invectives contre Puillon-Villéon, qui s'enfuit à toutes voiles en donnant le signal de la retraite, quand il prit possession du commandement, après la mort de son commandant en chef.
La Résolue jeta l'ancre en rade de Morlaix; mais son capitaine fut destitue.
La Babet tomba au pouvoir des ennemis, au commencement du combat.
Il faut prendre en considération, que les Anglais eurent une grande supériorité dans cette rencontre , puisqu'ils avaient cinq fortes frégates contre trois des nôtres et une
corvette. »
La Résolue sera capturée par ce même HMS Melampus en mer d’Irlande le 14 octobre 1798.
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L’Alexandre était un petit bâtiment corsaire de 50tx, au tirant d’eau 1,75 m lège et 2,08 m chargé, armé de 4 petits canons. A la vue de son tonnage, sa coque ne devait pas dépasser les 15 m de longueur. Il est grée en dogre, un type de gréement originaire de la mer du nord, comportant un grand mât proche du milieu du navire avec une grand voile carré et un hunier, et un petit mât de tapecul avec une petite voile aurique et quelque fois un minuscule hunier. Ce gréement n’eu pas un grand succès en Bretagne, les corsaires armaient plus souvent des lougres, des cotres ou des bricks.
Son équipage, comme sur tous les corsaires était bien nombreux 53 hommes. L’équipage était principalement de Saint-Malo et des environs, le Second, le premier lieutenant et un enseigne sont des déportés de Saint-Pierre et Miquelon par les anglais , les marins de saint Pierre s’engageront volontiers sur les corsaires Français. Six matelots sont portugais.
Tous ne sont pas marins, certains sont inscrits maritimes, d’autres ne sont pas marin et sont notés volontaire sur le rôle.
Jean Moal, de l’île de Batz, à 20 ans lorsqu’il embarque sur ce corsaire il est le seul du Finistère, mais les iliens connaissais bien les corsaires de Saint-Malo, souvent au mouillage dans le chenal ou à Roscoff.
Son armateur, Alexandre Protel, n’aura pas un grand succès avec ce navire, armé à la course le 21 aout 1810 et sera pris par les anglais le 17 septembre de la même année.
Son équipage sera fait prisonnier par la Royal Navy , et se retrouva dans les prisons et sur les pontons anglais comme prisonniers militaires, tel a été le triste sort de nombreux corsaires sous l’empire.
L’engagement de l’équipage, s’est fait devant notaire : Maître François Xavier Louis MALAPERT, notaire de Saint-Servan en voici le rôle d’équipage
01 - MOAL Jean, fils de +Jean & Marie Glidic, de l'île de Batz – matelot
02 - BOHANNE Jacques Henry, fils d'Olivier, dmt Dinan – matelot
03 - TESSIER Jacques, fils de Louis, d'Hennebont – matelot (nul)
04 - NICOLAS Jean-Pierre, fils de +Louis, de St Servan – matelot
05 - DESOUSA Joseph, fils de Jean, Tercere au Portugal, dmt St Servan – matelot
06 - ALBERTO Joseph, fils de Joseph, Lisbonne au Portugal, dmt St Servan – matelot
07 - DURAND Louis Jean, fils de Gilles & Marie Michelle Epron, de St Nicolas quartier de Granville – novice
08 - MORIN Jean, fils de +Jean & Marie Lemarchand, de Pleurtuit – contremaître
09 - MALLET Jean, fils de François, de Bouillon (Manche) – novice cuisinier
10 - PERRIN Yves, fils de Jean & Giquette Le Blanc, Etable, dmt Pordic – matelot
11 - LE FRANC Marin, fils de +Robert, de St Servan – matelot
12 - GUYOMARD Joseph, fils de Pierre, de St Servan – charpentier
13 - REHEL Jean, fils de Jean, de Dieppe – second maître
14 - LERECULON Servan, fils de Servan, de St Coulomb – matelot
15 - MORVAN Olivier, fils de +Olivier, de Ploubalay – novice
16 - GUERIN Michel, fils de +Michel, de Combourg – novice
17 - OLLIVIER Jean, fils de Jacques, de St Servan – novice
18 - POIS-L'HERBE Jean-François, de St Servan – novice
19 - HAMONNI Jean, de Concligné? – novice
20 - AMIOT Pierre-Philippe, fils de Pierre, de Pleslin – matelot
21 - GROSSE François, fils de Pierre & +Jeanne Boileau, de Granville – novice
22 - FRANCISQUE (FRANSISCO) Marcial, fils de Charles, Lisbonne, dmt St Servan – matelot
23 - MARC François (Fransisco) fils de Vautrefrenance??, Brague au Portugal, dmt St Servan – matelot
24 - DESNOEVES Carlos, fils de Manuel, Lisbonne, dmt Solidor – matelot
25 - DIAS Francisco, fils de Manuel, Lisbonne, dmt Solidor – novice
26 - CŒURU Pierre, fils de Pierre, de St Servan – novice
27 - SIMON Nicolas, fils de +Nicolas, de St Servan – novice
28 - TALUSIER Jean marchand quincaillier, fils de Jean, de Nanclars– volontaire
29 - TARDIVEL Joseph, fils de François & Marie Postet, de St Malo – novice
30 - GRANDIN Louis, fils de Louis & Guillemette Grossin, de St Servan – maître calfat
31 - MERDRIGNAC Gilles, fils de Julien, de Corseul – volontaire
32 - GALLION Jean, fils de Mathurin, Pleugeuneuc, dmt St Servan – volontaire
33 - GUIOMARD François, fils de François, Pordic – matelot
34 - GUIOMARD Jean-Louis, fils de François, de Pordic – novice
35 - ROUXEL Charles Louis, fils de Louis, de Pleudihen – volontaire
36 - TEMOIN Laurent, fils de +Guillaume & Julienne Gouriot, St Quay, dmt St Brieuc – second maître, calfat
37 - CALVARI Jean-Louis, fils de Jean, de Portrieux – novice
38 - DEMAMETZ Pierre, fils de Thomas, de Dinan – chirurgien
39 - PEROT Geffroy, fils de Geffroy, St Seglin, dmt St Malo - volontaire
40 - TEHEL Etienne, fils de Jean,St Servan – maître canonnier
41 - HOUSSAIS Jean-Pierre, fils de Charles, Dol, dmt St Malo – novice
42 - PERIGAUX Jean-François, fils de Philippe, de Portrieux – pilote côtier
43 - LE FEVRE Ambroise Marie, fils de +Antoine, de Dinan – écrivain
44 - ROCHARD Jean, fils de Jean, de St Servan – mousse
45 - PARISCOT Michel François, fils de +Jean, de St Servan – mousse
46 - POINTEL Paul, fils de +Luc, dmt St Servan – capitaine en chef
47 - DIBARBOURE Jean-François, fils de +François, Saint-Pierre et Miquelon, dmt St Servan – capitaine en second
48 - GAUTIER Simon, fils de Nicolas, Saint-Pierre et Miquelon, dmt St Servan – 1er lieutenant
49 - GARCIN Auguste, fils de Dominique, de St Malo – enseigne
50 - MISSER Joseph, de St Malo – maître d'équipage
51 - TURNIER Pierre Saint-Pierre et Miquelon, dmt St Servan – enseigne
52 - TOUSÉ Olivier, fils de Guillaume, St Brieuc, dmt Pordic – volontaire
53 - LE HIDOUX Jean-Baptiste, fils de Jean-Baptiste, de St Brieuc, dmt Etable – novice
Sources :
Un site internet original, consacré aux actes notariés maritimes du pays de Saint-Malo : MARINS, BATEAUX & NOTAIRES
Le site de Daniel Burgot consacré entre autre aux corsaires Acadiens : Acadie
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Le contexte maritime sous la révolution française
A la veille de la révolution française, la marine est certainement a son apogée, les navires son nombreux et d’un niveau technologique satisfaisant.
Sous la révolution la situation de la marine de dégrade, la marine est totalement désorganisée, tout manque, matériaux pour l’entretien et les réparations des navires, les munitions les vivres. A Brest de par son enclavement et le blocus maritime la situation st catastrophique. La guerre avec le Royaume-Uni est déclarée le 1er février 1793.
La marine subit alors de grosses défaites, le port et l’arsenal de Toulon est pris par les Anglais et occupé jusqu’en décembre 1793. En juin 1793 lors de la bataille du 13 prairial appelée également la troisième bataille Ouessant qui eut lieu à 400 miles dans l’ouest d’Ouessant entre l’escadre de l’amiral Villaret Joyeuse et l’escadre anglaise de l’amiral Howe A l’issue des combats navals les français avaient perdu sept navires, 13 avaient été sérieusement endommagés, 1 654 hommes avaient été tués, 1 000 blessés et 4 000 prisonniers, alors que du côté britannique on comptait huit navires sérieusement endommagés, 287 morts et 811 blessés.
La croisière du grand hiver et le naufrage du Neptune
Pour voir les circonstances de ce naufrage voici un extrait « Batailles navales de la France » par O. Troude publié en 1867
« A la fin de cette année (1794), le gouvernement donna l’ordre au contre-amiral Renaudin de partir de Brest avec 6 vaisseaux, 3 frégates et une corvette pour porter des projectiles à Toulon. Le vice-amiral Villaret, qui avait conservé le commandement de l’armée navale, devait escorter cette division en dehors du golfe de Gascogne, croiser ensuite pendant quinze jours dans ces parages et, avant de rentrer, détacher 6 vaisseaux et 3 frégates à la Guadeloupe et à Saint-Domingue. La pénurie en vivres et en approvisionnements était telle à Brest, en ce moment que, pour armer complètement les vaisseaux et les frégates en partance et pour donner six mois de vivres à ceux qui allaient aux Antilles, il fallut dégarnir les autres. Parmi ces derniers, plusieurs durent sortir n’ayant que pour quinze jours de vivres. La plupart avaient des mâts jumelés et les coques étaient généralement hors d’état de résister à un mauvais temps. L’armée avait essayé plusieurs fois de sortir. Le 24 décembre, le vice-amiral Villaret fit de nouveau à l’armée le signal d’appareiller ; il ventait grand frais du N.E. Cette fois encore elle resta au mouillage ; le signal de mettre sous voiles n’avait cependant pas été annulé. Un incident malheureux marqua cette dernière tentative d’appareillage. Le vaisseau de 110 canons le Républicain chassa sur ses ancres pendant qu’il virait et, dérivant sur la roche la Cormorandière, il laissa tomber deux ancres. Le capitaine Longer appareilla à 2h 30mn mais, ne se voyant pas suivi, il mouilla dans le goulet. L’ancre était à peine au fond que, sur les observations du pilote, il donna l’ordre de la lever. Pendant qu’on y travaillait, le câble cassa et, avant que les voiles fussent établies, le Républicain fut porté sur la roche Mingan ; il était alors 5h 30mn du soir. Quelque moyen qu’on employât pour le retirer, le vaisseau ne bougea pas. Bientôt il commença à talonner, et l’eau entra dès lors rapidement dans la cale ; la batterie haute et celle des gaillards furent jetées à la mer. Le vaisseau étant échoué par l’arrière, l’eau se porta de l’avant et cette partie s’enfonça incessamment. Toutes les embarcations étaient déjà brisées ou emportées. La violence du vent empêcha de porter des secours au Républicain avant le lendemain. Le vaisseau le Fougueux, capitaine Labrier, arrivé l’avant-veille de Rochefort et mouillé à Camaret, lui envoya ses embarcations à 9h, et parvint à sauver la majeure partie de l’équipage ; dix hommes seuls se noyèrent. […]
Enfin, le 29 (décembre 1794) dans l’après-midi, l’armée navale, forte de 35 vaisseaux, outre les frégates et les corvettes, mit à la voile et alla mouiller à Camaret pour attendre quelques retardataires ; elle fit route définitivement le lendemain.[…]
L’armée navale et la division réunies formaient un total des 35 vaisseaux que voici :
Montagne (118 canons) capitaine Vignot, vice amiral Villaret Joyeuse
Terrible (110 canons) capitaine Bedout, contre amiral Nielly
Révolutionnaire (110 canons) capitaine Leguardon
Majestueux (110 canons) capitaine Lebeau
Neuf Thermidor ( ex Jacobin 80 canons) capitaine Dorré
Scipion (80 canons) capitaine Huguet
Indomptable (80 canons) capitaine Lamesle
Jemmapes (80 canons) capitaine Laffon, contre amiral Renaudin
Montagnard (74 canons) capitaine Richery
Gasparin (74 canons) capitaine Lhermitte Jean
Trente et un mai (74 canons) capitaine Ganteaume Honoré
Alexandre (74 canons) capitaine Guillemet
Aquilon (74 canons) capitaine Laterre
Redoutable (ex Suffren 74 canons) capitaine Moncousu
Patriote (74 canons) capitaine Letendre
Nestor (74 canons) capitaine Monnier
Convention (74 canons) capitaine Terrason
Pelletier (74 canons) capitaine Raillard
Trajan (74 canons) capitaine L.eray
Entreprenant (74 canons) capitaine Dufay
Tyrannicide (74 canons) capitaine Dordelin Joseph
Neptune (74 canons) capitaine Tiphaine
Révolution (74 canons) capitaine Laindet Lalonde
Tourville (74 canons) capitaine Henry Jean-Baptiste
Marat (74 canons) capitaine Lefranck
Superbe (74 canons) capitaine Colomb
Escadre légère
Tigre (74 canons) capitaine Matagne, contre amiral Vanstabel
Zélé (74 canons) capitaine Porlodec
Jean-Bart (74 canons) capitaine Pillet
Téméraire (74 canons) capitaine Morel Henry
Fougueux (74 canons) capitaine Giot Labrier
Éole (74 canons) capitaine Trinqualéon
Audacieux (74 canons) capitaine Pilastre
Mucius (74 canons) capitaine Larréguy
Droit de l’Homme (74 canons) capitaine Cornic Dumoulin Yves
Frégates :
Vertu, Courageuse, Méduse, Virginie, Surveillante, Insurgente, Railleuse, Précieuse, Fraternité, Embuscade, Tamise, Charente, Républicaine.
Corvette :
Berceau, Bayonnaise, Légère, Espion, Bergère, Impatiente, Atalante.
Brigs :
Paillon, Bonnet Rouge
Le vent souffla avec violence pendant la nuit du 1er janvier ; plusieurs vaisseaux firent des avaries ; le Nestor, entre autres, fut obligé de rentrer par suite d’un démâtage et le Téméraire signala une voie d’eau qui donnait des inquiétudes. Le vent ayant diminué le lendemain, le contre amiral Vanstabel reçut l’ordre de chasser dans le N.O. avec l’escadre légère : une brume intense qui survint quelques heures après, le sépara de l’armée et il ne la rejoignit que le 24 avec un autre vaisseau, le Neptune, 3 frégates et deux corvettes, aussi séparés, et qui l’avaient rallié. La persistance des vents de S.E. inspirait des craintes sérieuses. J’ai déjà dit que plusieurs vaisseaux étaient sortis avec quinze jours de vivres ; le vice-amiral Villaret dut en retirer à ceux qui se rendaient à Toulon pour en donner aux vaisseaux et aux frégates qui n’en avait plus. Cette opération, assez délicate à la mer, était à peine terminée, qu’un brouillard très épais dispersa l’armée de la République et, le 28, un coup de vent, qui fort heureusement se déclara au S.O., occasionna quantité de désastre.
Le téméraire, dont la voie d’eau était devenue alarmante, fit route pour Brest sous la misaine. Privé d’observations depuis plusieurs jours, le capitaine Morel atterrit sur le cap Fréhel et entra à Saint-Malo.
Retardé dans son appareillage par la rupture de son cabestan, le Neptune n’avait pu rejoindre l’armée à Camaret. Le 31, le capitaine Tiphaine rencontra le contre amiral Vanstabel et le suivit. La persistance du mauvais temps avait considérablement délié le Neptune ; les inquiétudes de son capitaine augmentaient chaque jour et il en fit part au commandant de l’escadre légère ; celui-ci, vu l’état de la mer, ne put que lui promettre des secours immédiats au moment même où ils deviendraient urgents. On a vu que ce vaisseau avait rejoint l’armée le 24 janvier. Une nouvelle voie d’eau, qui se déclara le lendemain pendant la nuit, obligea le capitaine Tiphaine à prendre les amures à l’autre bord en faisant des signaux de détresse ; mais incapable de tenir de le travers, il lui fallut gouverner vent arrière. Les pompes ne franchissaient plus et toute la partie de l’équipage qui n’était pas occupée à pomper, était employée à vider l’eau avec des bailles et des seaux. Presque toute l’artillerie. Les boulets et les ancres furent jetés à la mer. Cette situation critique dura cinq jours et pendant les trois derniers, personne ne bougea du poste qui lui avait été assigné. Enfin, le 28, la terre fut aperçue, et à midi trente minutes, le Neptune était échoué sur les vases de Perros, à quelques lieues dans le nord de Brest. L’inclinaison du vaisseau devint telle qu’on coupa de suite la mâture et l’équipage fut envoyé à terre : cinquante hommes furent noyé dans l’intérieur . Le Neptune ne put être relevé. »
Compléments sur le naufrage du Neptune
Outre le naufrage du Neptune, on peut noter les naufrages des vaisseaux Scipion, Neuf-Thermidor, Superbe causé par le mauvais état des navires et les coups de vent successif d’autre navires de l’escadre eurent des avarie importante. Seule une parti de l’escadre rentra à Brest, le départ pour ravitailler Toulon fut reporté au mois de février ; Toutefois pendant cette sortie désastreuse l’escadre française captura 70 navires de commerce anglais ainsi que la frégate Daphne.
Pour revenir au naufrage du Neptune, autres éléments sont donnés dans l’article de Claude Forrer intitulé « Le 9 pluviose an II de la république le Neptune s’échoue en rade de Perros » publié dans le Trégor sous la révolution tome II
Le 29 décembre alors qu’il appareille du mouillage de Bertheaume, son cabestan se brise, ce qui retarde son appareillage d’une journée, il sera remplacer par le cabestan du Pluton autre vaisseau de 74 canons désarmé à Brest. Le 9 janvier il subit un très fort coup de vent, le 10 janvier la guibre se rompit au dessus de la liure, la structure de l’avant soufre énormément. Pour renforcer la tenue du beaupré et de toute la mature, il fallut ceinturer l’avant par des grelins établis sur le beaupré et passant par les écubiers et la sabords du gaillard.
« Durant la nuit du 24 bau 25 janvier, la misaine et hunier sont emportés par le vent.
Le 25 janvier à 10 heures du soir, le Neptune était avec l’escadre légère, cap à l’est, sous u n grand vent du sud, quand une nouvelle voie d’eau se déclara à la joue bâbord obligeant à prendre le vent par l’autre bord, cap à l’ouest sud Ouest. Le 26, ne pouvant tenir en travers du vent, il fallut faire vent arrière sous un grand frais de sud-ouest. Pour alléger le bâtiment, huit canons de 18 livres et deux grandes ancres sont jetés à la mer quand le vent tourna au nord-ouest. Les pompes ne suffisaient plus à étaler les voies d’eau.
Le commandant Tiphaine décrit les efforts accomplis pour essayer de maintenir le navire à flot :
« Ce fut après et même avant ces mesures que je fis établir la pompe à laver dans la grande écoutille et la pompe à incendie dans la fosse aux câbles avec une chaîne de 70 hommes dans ledit lieu, une autre chaîne de 88 hommes dans le puits de pompe, une troisième de 60 dans la cale au vin, enfin une quatrième de 60 hommes dans la soute aux poudre qui, toute récapitulation faite, faisait par notre estime y compris les pompes l’effet de 13 à 14 et malgré ces précautions exécutés sans manger qu’un peu de biscuit et un peu de vin ou d’eau de vie de temps à autre pendant cinq jours et sans dormir pendant trois fois 24 heures, l’eau augmentait au point de ne nous laisser aucun espoir ayant déjà le 9 dudit mois (28 janvier) à 3 heures du matin 9 pieds d’eau (2 ?90m) dans la cale. »
Petit commentaire : les vaisseaux sont équipés de 6 pompes dites royales , elle sont à brinquebale actionnée chacune par 14 hommes.
D’après le commandant nous avons donc 362 hommes sur un équipage de 700 occupés à pomper en permanence pendant 5 jours, le commandant estime l’effet à l’équivalent de 14 pompes soit un débit approximativement de 8400 litres à la minute soit 12 000 tonnes d’eau en une journée ce qui est énorme !
L’on commençait à désespérer de la situation du vaisseau toujours poussé par la forte brise de nord-ouest quand, à neuf heure du matin, on reconnut la terre. Chacun redoubla d’effort. Le commandant faisant jeter à la mer huit autres canons de 18 livres et tout ce qui était possible de boulets et autres poids mobiles jusque et y compris les fusils. Le Neptune, poussé par le vent, fut assez heureux pour franchir la passe de l’ouest et arriver en rade de Perros où le gouvernail presque arraché, n’agissant pratiquement plus , il s’échoua avec 12 pieds 4 pouces (4m) d’eau dans la cale, à midi et demi le 28 janvier 1795. La force du vent le prenant pars le travers lui donna brutalement de la bande de près 50 degré sur bâbord. L’équipage effrayé coupa les rides des haubans et les trois mâts tombèrent.
Le commandant envoya un canot à terre mais aucune aide ne vint. Dans la journée des hommes forcèrent les panneaux de la cale à vin et s’enivrèrent au point qu’à marée montante ils se trouvèrent noyé au nombre d’environ cinquante.
L’équipage de 700 hommes sera presque entièrement sauvé, débarqué et logé chez l’habitant le lendemain le 29. Par sa manœuvre d’approche de la terre, son atterrage en baie de Perros et la mobilisation de l’équipage à pomper, le command Tiphaine réussit à sauver la quasi-totalité de son équipage . Pour l’atterrage , il y avait a bord au moins un pilote côtier qui je pense connaissait les danger de Perros, pour, dans du gros temps, avec un vaisseau peu manœuvrant, une partie de la voilure est déchiré et la coque fait de l’eau, réussit à parer les dangers des Triagoz et des Sept-Îles et a franchir la passe de l’ouest pour entrer en baie de Perros. Rappelons qu’à l’époque aucun balisage n’existait localement
Le Neptune examiné par une commission sera évalué en trop mauvaise état pour tenter de le relever. La marine organisa la récupération des canons, de la mature et d’autre matériel par la flute la Lourde. La coque est mise en vente , mais la vente n’intéresse personne. La population locale exploita certainement l’épave pour en tirer du bois de chauffage ou de construction.
L’épave, la quille des membrures et les bordées de fond, gisent encore par quelques mètre de fond à basse mer à proximité de Roch Hu et de Gribineyer par 48° 49,075 N et 3° 24,776 0
Le vaisseau de 74 canons Neptune
Le Neptune est un vaisseau de 74 canons, ce type de vaisseau est à la fin du XVIIIème siècle l’arme idéale, regroupant manœuvrabilité et puissance de feu. Les vaisseaux de 74 canons représente la marine de cette époque. La France construira approximativement 100 vaisseaux de 74 canons entre 1877 et 1814.
Sont armement est 28 canons de 36 livres (poids du boulet de fonte), 30 canons de 18 livres et 16 canons de 8 livres .
Sa longueur est de 54,7 m, sa largeur de 14,3m sont tirant d’eau de 6,7 m.
Le Neptune a été construit à Brest sur plan de l’ingénieur constructeur Lamothe, au moment de l’implication de la marine française pour la guerre d’indépendance des États -Unis d’Amérique
Sa construction a commencé en décembre 1777, il fut mis à l’eau le 20 aout 1778, et entra en service le 16 septembre 1778.
Le 16 septembre 1778 il est mis en rade de Brest sous le commandement de Latouche Tréville
Le 21 octobre 1778 il capture le corsaire anglais Hercule
Le 6 octobre 1779 il participe à la campagne franco-espagnole de la Manche pour une tentative de débarquement en Angleterre
Le 16 mars 1781 il participe au combat du cap Henri et le 26 janvier 1782 au combat de Saint Christophe
Le 12 avril 1782 il participe au combat contre le HMS Repulse et HMS Canada à la Dominique et le 17 juin 1783 il est de retour à Brest ou il sera désarmé de 1788 à 1793
Réarmé dans le contexte des guerres de la révolution en 1793 il participe, le 16 juin 1794 Combat de prairial et comme nous venons de le voir à la croisière du grand hiver 1794 1795.
Suite à son naufrage à Perros, il sera rayé des listes.
Le Neptune n’a pas été doublé en cuivre a la construction mais certainement pendant les années 1780 lors d’un grand carénage. En 1795 le Neptune à 18 ans ce qui commence à compter pour un navire en bois. De plus le chevillage du vaisseau a été réalisé en fer , et le vaisseau est doublé en cuivre ce qui accélérera la corrosion des chevilles par effet électrolytique, Pour les navires doublé en cuivre dès la construction les œuvres mortes sont généralement chevillé en bronze. Sous la révolution les réarmement sont fait à la hâte sans avoir réalisé de travaux importants sur la structure des navires.
Les sources
Un article de Claude Forrer intitulé « Le 9 pluviose an II de la république le Neptune s’échoue en rade de Perros » publié dans le Trégor sous la révolution tome II Les blancs les bleus et les autres
Autres documents sur le naufrage du Neptune qui pourront être exploités SHD Château de Vincennes
BB4 65. CAMPAGNES. 1795. VOLUME 2
Vaisseau le Neptune (Brest ; croisière du Grand Hiver ; perdu par
échouement à Perros le 9 pluviôse an III), cdt. Tiphaigne, capitaine de
vaisseau. 10 pluv.-8 germ. an III
BB4 67. CAMPAGNES. 1795. VOLUME 4.
Armée navale de l'Océan (vice-amiral Villaret-Joyeuse).
copie de rapport sur le naufrage du vaisseau le Neptune
BB4 93. CAMPAGNES. 1795. VOLUME 30.
Bâtiments isolés (J-M) — Missions particulières.
Flûte la Lourde (rade de Cherbourg ; escortes de convois de Cherbourg à
Brest ; travaux de récupération sur l'épave du vaisseau le Neptune, naufragé
à Perros-Guirec).
— Cdt. Pitel, lieutenant de vaisseau (mort le 22 germinal an III).
— Puis Legrand, lieutenant de vaisseau.
— Journal de navigation et copie du journal de bord de la Lourde.
10 niv.-18 flor. an III
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Les bateaux
EMMA 19,83 t immatriculé à Paimpol n° 2536, armateur Gustave LESAGE de Paimpol, Équipage : CAOUS
Louis Patron Paimpol, RICHARD Matelot Paimpol, X..... Matelot Paimpol, CAOUS Mousse Paimpol + un jeune garçon passager, fils de l'un des
matelots
LEONINE 20,49 t immatriculé à Paimpol n° 2475 armateur Mademoiselle Léontine ROZE de Paimpol Équipage : LE GUEN Jean-François Patron Paimpol + 3
hommes
JEANNE D'ARC 17,68 t immatriculé à Paimpol n° 2099 armateur Jean-Louis CORFDIR et Yves RIOU de Paimpol Equipage CORFDIR Jean-Louis Patron Paimpol RIOU
Yves Matelot de Paimpol + 3 hommes
FARFADET Environ 17 t immatriculé à Morlaix n° 1235 Armateur Charles ROIGNANT de Roscoff Equipage : MORVAN Guillaume Paimpol
+ 3 hommes
La perte des navires
L’Emma, la Léonine, la Jeanne d’Arc et le Farfadet ont quitté Paimpol le 3 Septembre 1916 pour la pêche aux crustacés sur le plateau des Triagoz, à l'emplacement dit La Petite Fouillie.
Le 7 Septembre vers 12h30, beau temps, mer belle, petite brise de NE.
Un sous-marin émerge tout près de l'EMMA qui aussitôt vire de bord. Le sous-marin tire alors deux coups de canon à blanc et fait signe d'abandonner et de venir à bord. Le canot est mis à l'eau et
l'équipage se rend à bord du sous-marin. Le commandant garde à bord le matelot Richard, le mousse Caous et un jeune garçon passager, fils de l'un des matelots. Deux marins allemands se font
conduire sur EMMA, puis sur les trois autres bateaux de pêche qu'ils coulent successivement au moyen de bombes. Au fur et à mesure, le sous-marin prend en remorque les canots des naufragés, sauf
celui de l'EMMA. Toute l'opération dure environ une heure, puis les marins reviennent sur le submersible. Les hommes de l'EMMA sont remis dans leur canot et le commandant du sous-marin les
autorise à gagner la terre.
Les Allemands ont pris des homards, du sucre, de la bougie, tous les compas et les pavillons et flammes des bateaux. Ils ont laissé les papiers.
Les équipages, 17 hommes en tout plus 1 passager, ont regagné Trébeurden vers 17h00. Tous sont inscrits à Paimpol où ils ont été rapatriés le 8 Septembre.
Description du sous-marin
60 à 65 m de long
6 m de large
Arrière effilé. Kiosque au milieu du bâtiment
Tubes de 1 m de long de chaque côté du sous-marin
Canon peut-être de 100 mm sur l'avant du kiosque
1 périscope
Peint en noir et gris sombre, avec partie immergée couverte d'herbes.
Vu deux officiers et 8 hommes.
1 officier (commandant ?) portant une veste de drap bleu avec pattes d'épaules et une casquette avec écusson.
1 officier vêtu de cuir jaune. L'un des officiers parlait difficilement le français.
Équipage en vêtements de cuir jaune. Bonnets avec rubans sur lesquels figuraient une inscription que l'on n'a pu lire car les rebords des bonnets étaient rabattus.
Le sous-marin évoluait très facilement et a émergé avec rapidité. Les coups de canon à blanc ont été tirés deux minutes après l'émersion.
Voici la silhouette du sous-marin
Le sous-marin attaquant
C'était l' UB 23 de l'OL Ernst VOIGT
Commentaires
Durant la guerre de 14 18 la flotte de sous-marins allemands s’attaqueront aux navires de commerce et de pêche alliés et leur feront subir de lourde perte, le plus souvent les équipages sont évacué, et les navires sont détruits par des explosifs.
Source :
Forum Page 14 18, forum marine
D’après le rapport fait par les patrons des bateaux pour la Marine Nationale
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Pendant les dernières courses de nos corsaires dans la Manche, un nom de capitaine devint tout à coup célèbre parmi les autres beaux noms de capitaines, mais célèbre à la manière du temps et de la foule qui redisait ce nom sans l’avoir jamais lu dans aucun livre ni dans aucun article de gazette ; les matelots en rêvaient dans leurs histoires de bord, et les habitants des ports de mer le répétaient mille fois par jour, depuis Brest jusqu’à Dunkerque : c’était là tout ce qui faisait alors la plus grande gloire des héros de la marine marchande et la renommée de nos belles actions navales. Si, à cette époque, il eût existé d’autre journaux que les feuilles esclaves du gouvernement, la presse libre n’eût pas manqué de célébrer Antonio Balidar, ainsi que, depuis, elle a illustré l’intrépide canaris et le brave général Allard. Mais comme en ce bon temps de soumission et de taciturnité périodiques, la presse était muette et l’histoire fort paresseuse , c’est à moi qu’il devrait être réservé de parler le premier de la vie maritime d’un des hommes les plus remarquables que les historiographes nautiques aient pu oublier dans leurs légendes aristocrates.
Jamais encore je n’avais entendu prononcer le nom du marin auquel je vais consacrer aujourd’hui quelques lignes d’illustration, lorsque je fus appelé par un heureux hasard à devenir le témoin du premier acte d’audace qui devait lui ouvrir le chemin de la fortune et de la renommée. Voici comment le fait que j’ai à vous raconter se passa pour Balidar, le héros de l’aventure, et pour moi qui ne pensais nullement alors, je vous jure, à devenir un jour son biographe.
Nous rentrions à l’île de Bas (ou de Batz, selon les savants), à bord d’un petit lougre convoyeur (1) placé fièrement en tête de cinq à six mauvaises barques que nous escortions depuis Brest. Une goélette anglaise, d’une belle apparence, s’était montrée le matin sur les atterrages de l’île, ou plutôt de la langue de sable à l’abri de laquelle nous allions chercher un mouillage pour nous et notre grand convoi. Mais comme le bâtiment en vue ne paraissait nullement chercher à contrarier notre pacifique manœuvre, nous ne pensâmes nullement non plus à aller le tracasser au large. Un petit cutter corsaire, mouillé cependant sur le chenal où nous nous disposions à jeter l’ancre, s’était avisé, lui, d’appareiller vaillamment avec l’intention assez manifeste d’aller attaquer, monté de trente cinq hommes d’équipage, la goélette qu’il avait aperçue avant nous, et que nous avions jugé à propos de laisser tranquillement poursuivre sa bordé au loin.
En passant à le ranger au moment où il sortait par la passe que nous avions prise pour entrer, nous demandâmes au petit sloop ce qu’il allait faire dehors : Enlouver à l’abordase cette méçante barque ; nous répondit un des hommes du corsaire, en nous montrant la goélette qui croisait en dehors. Cet homme à l’accent plus que méridional et à l’assurance plus que corsairienne, c’était Balidar.
Informé aussi officiellement de l’intention que nous avions supposée au capitaine, nous nous occupâmes, comme bien vous pensez, beaucoup plus de la manœuvre du bougraillon de corsaire, que de celle que nous faisions exécuter à bord de notre lougre, pour gagner notre paisible mouillage. La brise, qui jusque-là, avait enflé nos voiles, s’endormit bientôt sur la mer qui nous environnait et en dehors des rochers et des bancs de sable derrière lesquels nous allions nous nicher pour passer doucement la nuit. Le corsaire, après avoir contouré l’île avec le secours du dernier souffle de la risée, amena toute sa toile, pour border ses avirons et approcher à force de nage et à la faveur du calme plat, la goélette qui se trouvait encalminée à une lieue à peu près au large de lui. Cette chasse à l’aviron ne dura guère qu’une demi-heure, tant l’ardeur des rameurs était grande et tant la marche du cutter léger était rapide à la rame. Bientôt après cette demi-heure de nage écoulée, nous vîmes le corsaillon rentrer ses avirons, comme un oiseau de mer ferme ses ailles, une fois rendu sur la lame où il veut se reposer. Quelques coups de canon tirés par la goélette se firent entendre : le corsaire répondit, de son coté, à cette volée par quelques coups de fusils et de pistolets, faute de canons, et puis nous n’entendîmes plus rien… La grande goélette venait d’amener son pavillon pour le petit cutter !
Dans la nuit, nous vîmes arriver près du rivage, sur lequel nous étions restés attachés comme spectateurs, le corsaire triomphant traînant à la remorque la capture qu’il venait de faire, et qui se trouvait deux fois au moins aussi longue que lui. C’était une goélette de cent quarante à cent cinquante tonneaux, armée de six canons, montée de vingt cinq hommes d’équipage, et chargée de vivres fins pour les états-majors de l’escadre anglaise qui croisait sur les côtes du Finistère.
Ce fut alors seulement que nous pensâmes à demander aux pilotes de l’île de Bas comment se nommait le capitaine du corsaillon victorieux, et ils nous répondirent qu’on l’appelait Antonio Balidar ; qu’il était Basque, Portugais, ou peut-être bien même Espagnol, et que ce devait être, selon toute apparence, un gaillard d’assez de résolution. Les pilotes bas-bretons prédisaient alors le temps et devinaient déjà les hommes, comme vous voyez.
Notre plus grand désir, après avoir appris le nom du héros, fut de voir le héros lui-même. Nous nous rendîmes, pour satisfaire ce second mouvement de curiosité, à bord de son corsaire, pour lui faire agréer nos félicitations, qu’il reçut sans y prendre garde. Mais, malgré le peu de prix que sa modestie ou son indifférence semblait attacher à nos compliments, il daigna cependant nous annoncer que, pour peu que nous voulussions bien nous donner encore la peine d’attendre quelque temps, nous en verrions bien d’autres. Du reste, le capitaine Balidar était un assez beau garçon, quoique petit de taille, d’une figure large, ouverte et d’une mobilité d’expression peu ordinaire. Je remarquai que ses yeux, admirablement fendus sous leurs sourcils fortement dessinés, étaient recouverts par des cils noirs et lisses de la longueur d’un demi-pouce au moins. Je n’étais pas alors phrénologiste. Il n’était, au surplus, à la manière des autres capitaines de corsaire, vêtu à son bord que d’un gilet rond et d’un large pantalon bleu, comme tous ses matelots. La beauté mâle de sa physionomie et l’énergie qu’il portait dans la vivacité de son regard, auraient seuls suffi pour le faire reconnaître pour le capitaine au milieu de son équipage. C’était là surtout son premier signe de distinction. Lui-même comprenait si bien, en définitive, l’influence et l’autorité que son heureuse et imposante figure devait exercer sur le moral de ses gens, qu’il disait quelquefois, en se plaçant le doigt sous l’œil, à la façon mimique des méridionaux, que c’était là que, lui, portait ses grosses épaulettes de capitaine de vaisseau. Et en effet, comme disent les matelots, tout son monde lui obéissait à l’œil et au pouce, et jamais la discipline maritime ne fut mieux observée au large qu’à bord des navires que commandait cet intrépide homme de rien.
La goélette anglaise dont il s’était emparé si souplement à nos yeux, alla désarmer immédiatement pour être vendue dans le port de Roscoff, situé à peu de distance du chenal de l’île de Bas. Elle réarma bientôt après sous le nom de l’Espérance, pour le compte de M. Guilhem, de Brest, qui l’expédia ensuite en aventurier à l’île de France.
Le petit cutter que commandait Balidar, lorsqu’il fit la capture de l’Espérance, était un de ces légers corsaires d’été que les armateurs de Calais, de Boulogne, de Dieppe et de St-Malo , envoyaient, pendant les calmes de la belle saison, s’emparer à la rame des gros navires anglais qu’ils pouvaient rencontrer dans le chenal. Après avoir donné des preuves si évidentes de son habileté et de son audace, il ne fut pas difficile au capitaine portugais d’obtenir, pour la course d’hiver qui se préparait, un navire plus fort que celui sur lequel il avait si brillamment débuté dans la carrière du commandement. L’hiver suivant nous le vîmes venir au mouillage de l’île de Bas, où nous l’avions rencontré la première fois, sur un beau lougre de Calais, à bord duquel il se promettait bien, comme il le disait, de faire des siennes aux dépens du commerce anglais. Le lougre nouveau se nommait, autant que je puis me le rappeler, La révolution. […]
En se rendant de son port d’armement à l’île de Bas, Balidar avait donné à l’équipage de son lougre nouveau une preuve assez singulière de son sang-froid et de sa présence d’esprit. Étant tombé de son bastingage à la mer dans la baie de Lannion, au moment où, un petit porte-voix à la bouche, il donnait un ordre à ses gens, on le vit, au milieu des lames, commander à son corsaire la manœuvre qu’il fallait qu’il fit pour le sauver, lui, le capitaine du navire. C’est la première fois sans doute qu’un capitaine s’est avisé de donner, en nageant, des ordres au porte-voix à son équipage ou à son officier de manœuvres.
Peu de jours après être arrivé au mouillage, où il attendait, amarré auprès de nous, une brise favorable pour commencer sa course, Balidar apprit qu’un grand lougre de Jersey avait établi sa croisière au large de l’île de Bas, pour bloquer, dans ce port, les trois ou quatre corsaires qui s’y trouvaient en relâche. L’occasion d’ouvrir sa campagne d’hiver comme il avait clos sa campagne d’été, lui parut belle. Il n’avait à bord de la Révolution qu’une centaine d’hommes d’équipage ; il se procura à terre, au moyen d’un millier de francs, le supplément de matelots qu’il jugeait nécessaire à l’exécution de son dessein, en prévenant toutefois les nouveaux engagés qu’il ne les louait que pour le moment du coup de peigne. Puis, toutes ces dispositions faites, il dit, un beau soir à ses collègues, les autres capitaines de corsaires : Ce grand coquin de Jersien vous bloque ici : moi, je vais vous débloquer du Jersien, et cela annoncé, voilà le lougre la Révolution parti avec les premières ombres de la nuit pour aller se donner une peignée, c’était alors le mot, avec le redoutable lougre anglais qui jusque-là avait insolemment défié tous les corsaires mouillés dans le chenal de l’île.
Cette nuit fut terrible : deux heures après le départ de Balidar, l’horizon s’embrasa du feu que vomissaient à courts intervalles les canons et la mousqueterie des deux navires, en ébranlant l’air, au bruit de leur volées et de leurs décharges, d’un sourd roulement semblable au fracas lointain de la foudre. Ce ne fut que vers le matin, et avec les premières lueurs du jour, que le combat cessa et que l’on vit la révolution, à moitié démâtée, regagner, les voiles criblées et les pavois enlevés, la passe qu’elle avait prise la veille pour joindre le lougre anglais. A la rentrée de Balidar sur le chenal de l’île de Bas, les premières embarcations qui l’abordèrent pour lui porter secours, revinrent à terre chargées de morts et de blessés, et couvertes du sang qui ruisselait du pont du corsaire à la mer.
Trente homme avaient péri dans l’abordage que la révolution avait livré à l’ennemi. Le lougre que le corsaire avait ainsi accosté dans la nuit était armé de deux cent hommes d’élite et de douze pièces de canon. Les deux navires, après être restés crochés l’un à l’autre pendant trois heures, s’étaient séparés par l’effet de la lame et du vent, et Balidar, demeuré à bord de l’anglais pendant que son lougre avait pris le large, s’était vu contraint de se jeter à la mer pour regagner à la nage son lougre épuisé et délabré…
Le grand lougre anglais, plus maltraité encore que son adversaire, avait repris péniblement la bordée du nord, pour éviter l’attaque nouvelle que Balidar n’aurait pas manqué de lui livrer pour peu que son corsaire de fût trouvé en état de lui appuyer la chasse… Mais, comme disait le capitaine portugais, après avoir rejoint ses gens à la nage : « ce n’est pas le cœur qui nous manque, ce sont les jambes ; ce coquin de Jersien a encore de la toile, et nous n’avons plus que des mouchoirs de poche pour faire route avec le vent… Oh ! si jamais le gueux retombe sous ma coupe !
Les anecdotes particulières arrivent à la suite de l’histoire générale. Un des officiers de la révolution, le seul qui fût resté intact de tout l’état-major, nous raconta que son capitaine ayant déchargé sur le capitaine anglais les deux pistolets avec lesquels il était sauté un des premiers à l’abordage, s’amusait à assommer à grand coup de crosse de pistolet les jersiens, qui fuyaient devant lui comme un troupeau de moutons devant un loup affamé. « Je ne sais pas, le diable m’emporte, ajoutait cet officier, comment il n’apas été étendu mort cent fois ! il faut que les balles et les coups de sabre lui aient glissé sur le casaquin. Resté seul de tous nous autres, à bord du lougre ennemi, les Anglais n’osaient plus taper sur lui, et il aurait seul amariné le navire, s’il avait pu le manœuvrer seul. Il ne s’est, au reste, jeté à la nage pour nous rejoindre que de sa propre volonté, et comme s’il avait eu besoin de prendre un bain à la lame. »
Mais ce fut à son retour à Roscoff que le glorieux capitaine fut accueilli étrangement pour un triomphateur ! Toutes les familles des gens qu’il avait levés la veille, pour l’aider à donner son coup de peigne, lui redemandaient compte des pères, des frères ou des enfants qu’il leur avait fait tuer dans son engagement avec le bougre anglais. « Que voulez vous que j’y fasse ? répondit Balidar aux lamentations de toutes les mères, les sœurs et les filles qui le suivaient en pleurant ou en criant ; ne les avais je pas prévenus d’avance que je leur ferais gagner leur argent ? Moi même j’ai cherché à gagner le mien. Mais, dans ces sortes de bamboches militaires tremble qui a peur, malheureux qui est pris ! »
Au surplus, toutes les veuves et les orphelins furent indemnisés avec libéralité par le généreux corsaire ; les blessés reçurent, dans une salle qu’il disposer à part, tous les soins que l’on pouvait acheter au prix de beaucoup d’argent et de sacrifices.
Au bout de huit à dix jours, le lougre la Révolution, réparé, regréé et restauré, reprenait la mer, frais et dispos, comme un navire sortant des chantiers pour aller chercher au large d’autres combats et faire payer cher aux anglais le demi-échec que le Jersien lui avait fait éprouver.
Il rentra après un mois de croisière avec trois ou quatre prises d’une assez grande valeur, mais sans avoir rencontré cette fois l’occasion de renouveler sa bamboche militaire.
Devenu riche par les captures qu’il avait faites, et fameux entre tous les corsaires par les actions d’éclat qu’il avait attachées à la source de sa fortune, Balidar eut un jour la fantaisie de se marier […], devint propriétaire d’un propriétaire d’un des grands hôtels du port de mer où il avait trouvé son épouse. Le balcon de l’hôtel était en fer ; l’acquéreur le fit remplacer le fit remplacer par une balustrade d’argent massif ; et quelques jours après avoir installé sa femme dans la maison somptueuse qu’il venait de faire meubler splendidement, voilà le corsaire qui quitte sa maison nouvelle , sa jeune épouse et son balcon d’argent, pour aller se jeter à bord d’un grand cutter qui l’attendait au sortir de l’autel, e t tomber au beau milieu de ses anciens compagnons d’aventures, avec lesquels il reprend la mer comme s’il avait eu encore sa fortune à faire et son avenir à assurer.
Cette reprise de possession du métier fut encore marquée par un de ces événements qui signalaient presque toujours la réapparition de Balidar dans les mers de la Manche. Un petit brick de guerre anglais se trouva, par malheur pour lui, sur la route que prenait le cutter du nouveau marié pour se rendre à l’ouverture de la Tamise. Le cutter chasse dans la nuit le brick, qui se laisse poursuivre, avec l’intention de faire payer cher son audace ou sa méprise au bâtiment chasseur, qui semble s’être fourvoyé en manœuvrant pour l’accoster.
Mais Balidar, qui a deviné la force, l’espoir et le projet du brick de guerre, ordonne à tout son équipage de se tenir à plat ventre sur le pont, pendant que lui seul gouvernera le cutter de manière à aborder l’ennemi au moment opportun. C’est alors , dit il à ses gens , qu’il sera temps , mesdemoiselles, de vous relever de couche, et vivement ! le brick anglais, à l’instant où il voit arriver à une portée de fusil dans ses eaux, le corsaire dont il croit pouvoir s’emparer comme d’une proie qui lui est acquise, commence par venir brusquement en travers pour envoyer par l’avant toute sa volée à son téméraire adversaire. La mitraille siffle, pleut sur ce pauvre cutter et sur Balidar, qui, toujours placé debout à la barre, reçoit, en se secouant les oreilles, ce bruyant coup d’éventail. Mais avant que l’anglais ait pu changer de bord pour lancé une autre volée au corsaire qui continue à l’approcher, celui-ci vous élonge son brick par la hanche, et lui vomit sur le pont 150 lurons qui, la hache et le poignard à la main, vous enlèvent en dix minutes la prise sur laquelle eux aussi avaient compté comme sur une proie inévitable.
La nuit même de cet engagement, le cutter, après avoir expédié pour la France le brick capturé, amarina les trois ou quatre gros navires qu’escortait le brick anglais, devenu si vite à la mer une prise française. […]
La noble, la douce, la glorieuse paix de 1814, descendit enfin du ciel sur le monde épuisé, comme disaient tous les bons Français dont fourmillait notre heureux pays. Balidar, comme tous ses autres compagnons de courses, rentra avec cette paix dans le néant d’où la guerre l’avait fait sortir […]
Quelques capitaines du Havre, longtemps après la paix, disent avoir rencontré qur les côtes du Mexique, le fameux corsaire faisant encore la course, là où la course pouvait encore se faire. Un de ces capitaines m’a même rapporté que, pouvant s’emparer du navire qu’il montait, Balidar se contenta de lui demander son nom, et qu’après l’avoir reconnu pour un de ses anciens amis, il lui cria au porte-voix : « Continue tranquillement ta route. Va dire dans ton pays que j’aimerai toute ma vie les Français. »
Ce fut là le dernier mot que le corsaire portugais adressa sans doute à la France, en pleine mer, à deux mille lieues de la patrie bien aimée qu’il avait adoptée et qui ne l’adopta pas.
Édouard Corbière dans le tome sixième de la Revue maritime de 1836
Notes :
(1) Édouard Corbière a été aspirant sur le lougre le Granville armé pour la protection des convois.
Le nom du lougre de Balidar révolution , est certainement inexact, Balidar a commandé « le point du jour » et le « pourvoyeur »
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Le documents suivant, conservé au musée de Dieppe est vraiment remarquable.
La représentation de petits navires du milieu du XVIIIème siècle est rare, l’identification et la description de l’histoire des bateaux est encore plus rare.
Ce document anonyme, comporte 15 planches dessinées au lavis représentant les corsaires du port de Dieppe pendant la guerre de Succession d’Autriche de 1740 à 1748.
Les corsaires fréquentaient l’ensemble des côtes de la manche et par conséquent celle de Bretagne Nord, la rade de l’île de Batz abrité par ses batterie est un abri prisé par les corsaires, Roscoff et Morlaix sont des ports ou sont envoyé les prises réalisée dans l’ouest de la manche.
Les relations entre la Bretagne et la Normandie sont importantes, en temps de paix des navires semblables pratiquent le cabotage entre ces deux régions. Il est certainement difficile de caractériser des particularismes locaux normands dans la construction ou le gréement de ces bâtiments.
Ce document mériterai une étude approfondie et une édition papier.
Chaque planche est commentée sur une feuille en rabat. Voici sa version intégrale, avec la description des planches (Le vocabulaire et
l’orthographe de l’époque sont respectés).
Desseins de tous les corsaires qui ont été faits et armez à Dieppe depuis le 28 septembre 1744 jusque au 4 aoust 1746 et ce qu'ils ont fait pendant leur première course
Le navire Lamarieanne a été fait et armé a Dieppe le 23 juillet 1745 ayant 10 canons 12 pierriers et 101 homme d'équipage commandé par le Capne Nicolas hautefeüille de Calais çe corsaire à fait quelques rençons quinont pas produit les fraits de son armement il à recommençé une autre course mais il n'a pas été plus heureux
La barque Le Renard d'un canon 5 pierriers et de 30 hommes d'équipage ce corsaire a été fait a Guernesay et armé à Dieppe le 4 aoust 1746 commandé par le Capitaine Jean Becquet pour faire la course pendant six semaines contre les anglais. Ce corsaire n'a encore rien fait il continüe sa course qui sera finie dans les passe de 20 jours. la pluspar de ses petits corsaires sont pris ou ne font rien
La double chaloupe La Conquérante a été faite et armée à Dieppe le 3 aoust 1745 commandée par le Capitaine Jacques Anquetil de Bologne ce corsaire avait deux canons 8 pierriers et 45 hommes d'équipage il à été pris par un vaisseau anglais à la côte d'Angleterre et mené à Douvre
La double chaloupe l'Eprevier de 5 canons 9 pierriers et de 40 hommes d'équipage commandée par leCapitaine Robert nicolle à été faite et armée à Dieppe le 16 juillet 1746 pour faire la Course contre les enemis de l'Etat pendant un mois ce Corsaire a été pris a la Côte d'Angleterre par un Navire anglois qui la mené à Douvres port d'Angleterre ou le Capitaine et l'équipage sont maintenant en prison à Posseter
La frécatte La Ste Geneviève le plus grand corsaire qui ait été fait à Dieppe en 1745 commandé par le Capitaine Edoüard Bouvier ayant 20 canons 20 pierriers et 217 hommes d'équipage il à fait la croisière dans les mers du Nord et de Lais il çest présenté des occations qu'il aurait fait des prises considérables mais l'inrésolution du Capitaine les a fait manquer àprès avoir fait quelques rençons et des prises peu considérable ce corsaire à relaché en holande ou il est maintenant tout l'équipage ayant abandonné le navire
Le Brigantin Le Glorieux à été fait et armé à Dieppe le 28 juin 1745 commandé par le Capne Jean helie de Dieppe ayant 6 canons 8 pierriers et 50 hommes d'équipage çe corsaire à fait pendant sa course quelques prises qu'ils n'ont pas produit les frais de son armement après la course il a désarmé à Dieppe
Le brigantin Le Cheval marin à été fait et armé à Dieppe le 12 octobre 1745 de 10 canons12 pierriers et 69 hommes d'équipages commandé par Le Capitaine Gabriel Paillet de Boulogne çe corsaire à fait dans le Commencement de sa course trois prises qui nont pas produit les frais de son armement et le restant de sa course il à été employé pour le service du Roy
La cache de Boulogne L'atrape si tu peux de deux canons quatre pierriers et 30 hommes d'équipage commandé par le Capitaine Joseph Arçin de Dieppe armé à Dieppe Le 4 aoust 1746 pour faire la course pendant six semaines contre les anglois ce corsaire ne fait rien il à été contraind de relacher au havre étant poursuit d'un vaisseau anglois qu'il l'aurait pris sil n'avait pas entré dans ce port
Le sloop La Mauve de 6 canons 8 pierriers et de 60 hommes d'équipage commandé par le Capitaine René Flahault à été fait et armé à Dieppe le 15 juin 1746 pour faire la course contre les Enemis de la france pendant un mois Ce corsaire à fait quelque prises qui ne produiront pas les frais de son armement il à désarmé à La Hougue après sa course finie
Le snow Le Renard de 12 canons 12 pierriers et 123. hommes d'équipage çe corsaire à été fait et armé a Dieppe le 28 septembre 1744 commandé par le Capne Antoine Figoly de D'unkerque il à fait une prise pendant sa première course d'un vaisseau anglais le Mulbery suivant Lextrait de liquidation qui ma été remis çest monté à la somme de 87000 lt. çest un des heureux corsaire qui ait été bâti et armé a Dieppe il a recommencé d'autres courses ayant armé dans un autre port
Le Snow Le Sirionne à été fait et armé a Dieppe le 27 octobre 1745 ayant 10 canons 12 pierriers et 100 hommes d'équipage commandé par le Capitaine Nicolas Paillet de Boulogne s'est vu des plus heureux corsaire que l'on ait armé à Dieppe il à fait deux prises considérable il y en à une à Cherbourg et l'autre à Dieppe La liquidation n'en n'est pas encore faite mais suivant les marchandises dont les deux prises sont chargées cela çe poura monté a 800000 lt
Le Snow Le Postillon de Boulogne armé a Dieppe le 13 avril 1746 de 10 canons 12 pierriers et de 89 hommes d'équipage commandé par le Capitaine Pierre Altazin çe corsaire ayant été croisé à la côte d'Angleterre a été pris par un vaisseau anglais qui la mené a Plymouth port d'Angleterre ou il est maintenant
Les deux dogres La Méduse et la Gorgonne ont été faits et armez a Dieppe le per février 1745 de 6 canons 8 pierriers commendés par les Capnes Jean Bactement et Jean Droo de Dunkerque Les deux corsaires nont rien fait pendant leur course ils ont désarmé à Dieppe La Méduse avait 60 hommes d'équipage et la Gorgonne 63 Je les ay représentez sur la même feuille àpartenant aux mêmes armateurs et ayant sorti du port le même jour pour faire leur course contre les enemis de l'Etat La Méduze à armé a Dieppe le 25 may 1746 pour faire la course contre les Anglais sous le commandement du capitaine Jean Bapte Decook de Dunkerque ce corsaire à été pris par un navire anglais et mené à Douvre port d'Angleterre
Les deux doubles chaloupes le Dauphin et Lalerte faites et armées a Dieppe le 8 juin 1746 de 2 et 3 canons 6 et 4 pierriers de 27 et 35 hommes d'équipage le dauphin est commandé par le Capitaine Nicolas Cauchois a 3 canons 4 pierriers et 27 hommes d'équipage et lalerte par le Capitaine Loüis Philippe Cloüet du bisson a 2 canons 6 pierriers et 35 hommes d'équipage ils font représentées sur la même feuille étant de même grandeur l'alerte commandée par le Capitaine Louis Philippe Cloüet du bisson à fait une prise d'un petit navire anglais dont la quarguéson est de pierre de taille amenée à Dieppe Ce corsaire à été pris par un vaisseau anglais et mené à Cossetert [sic] en Angleterre. Le Dauphin commandé par le Capitaine Nas Cauchois a fait 3 prises peut considérables qui payeront à peine les frais de son armement à désarmé a Dieppe depuis le Capne m'a dit que ses 3 prises pourront produire 16 000 lt
Les planches de ce document ont été trouvées sur la Base Joconde
http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/pres.htm
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Quelles stupeur, en cette belle fin de matinée du 12 juillet 1690, quand les habitants de l’île de Batz ont aperçu, arrivant de l’ouest faisant route dans le chenal, une flotte étrange.
Bien sur, les marins, les pêcheurs, les pilotes de l’île de Batz ont l’habitude de tirer sur les avirons. Mais la, même les plus anciens qui ont navigués sur les vaisseaux du roi, n’ont, certainement, jamais vu cela, quinze grands navires, bas sur l’eau ,avançant rapidement, propulsés par une cinquantaine de rames de plus de douze mètres, chacune mus par la force de cinq gaillards. Sur l’ensemble de ces navires ou peux compter plus de 5000 hommes.
C’est une flotte de quinze galères faisant route, par étapes, de Rochefort à Cherbourg.
Bâtiments spécifiques de la marine du levant, que font ses galères en manche ?
Depuis 1689, une coalition des royaumes d’Angleterre, de Hollande et D’Espagne est en guerre contre le royaume de France de louis XIV. Le secrétaire d’état à la marine, Seignelay, concentre les forces maritimes sur les côtes du ponant.
Un projet d’amener quinze galères depuis Marseille est lancé, ce projet ne peut aboutir, car la navigation des galères exige de fréquentes escales et l’Espagne est en guerre. Les galères seront, alors, construites à Rochefort. L’ordre est donné, la construction ne doit pas durer plus de dix mois.
L’arsenal de Rochefort et ses charpentiers n’ont jamais construit de Galère. Jean baptiste Chabert maitre constructeur des galères du roi à Marseille arrive avec ses équipes de charpentier à Rochefort.
La quantité de matériaux nécessaires est énorme, Mille rames de 12,60m seront réalisées en hêtre sous la direction de charpentier spécialisé les rémolats. Pour le gréement chaque galère a huit voiles soit un total de 120 voiles qui seront réalisées en deux mois en cotonnine, grosse toile de coton utilisée uniquement en méditerranée, sous la direction de trois comites marseillais.
De 550 personnes à 700 personnes travaillent, à l’arsenal de Rochefort à la construction de ces galères.
Dix mois après de début de la construction, début mai 1690 les 15 galères sont prêtes.
La chiourme, le moteur principal des galères est « réglée » 295 hommes par galère : 80 mariniers volontaires, 75 Turcs, réputés pour leur force et leur expérience et 140 forçats. C’est en tout plus de 5000 hommes qui viendront de Marseille pour armée cette flotte.
Les galères appareillent de Rochefort, le 14 juin, la remontée vers Cherbourg sera lente, elles ne naviguent que par beau temps, et le maitre de l’escadre est très prudent, la cotes ont d’ailleurs été spécialement décrite et cartographié pour cette expédition, lors de mission préalables .
Le 10 juillet elles appareillent de Brest. Elles rateront, ce jour, la bataille navale de Béveziers gagnée, sans gloire par la Français Le sort de cette bataille navale aurait pu être différent si quelques galères y avaient participé.
Elles étaient prévues pour remorquer les vaisseaux, pendant les combats en cas de calme ainsi que le remorquage rapide de chaloupes pour le débarquement de troupe en territoire ennemi.
Ce sera d’ailleurs la seule action glorieuse de cette flotte avec un débarquement de 1000 soldats en rade de Torbay le 31 juillet.
Cette flotte de galère peu adaptée aux conditions de navigation en manche et mal utilisée sera désarmée à Rouen et les chiourmes reconduites en méditerranée.
Seule deux galère seront réarmées, après modification pour pouvoir fonctionner avec 150 rameurs, à Saint-Malo contre les corsaires Jersiais.
Ces deux galères, la Sublime et la Constance arrivent à Saint Malo le 17 mai 1693 accompagnées par la frégate la Gentille , le recrutement des deux équipages pose de gros problème. Le 2 septembre elles seront désarmées en Rance à terre de l’ile Chevret. Elles seront réarmées tous les étés jusqu’en 1698
En 1698 la décision est prise de reconduire les deux galères à Rochefort. Elles partent le 18 octobre 1698 mais certainement contrainte par du mauvais temps elles se réfugient en rivière de Tréguier , ou elles sont alors désarmées pour l’hiver, elles ne repartiront vers Rochefort qu’au printemps suivant.
En conclusion, malgré une construction superbement mené presque sous forme d’un projet industriel, l’utilisation de cette flotte de galère du ponant sera un échec.
Pour imaginer le fonctionnement d’une galère, cette superbe animation en images de synthèses
http://www.youtube.com/watch?v=YYxrbtuyNG0&feature=player_embedded
Annexe 1 : Navigation en escadre des galères
Les galères naviguèrent de cette manière :
La Glorieuse
Commandante, au milieu de toutes, avancée des autres d’un corps de Galère
La Triomphante |
La sublime |
La Constante |
La Palme |
La Bellone |
La Martiale |
La Prudente |
La Combattante |
La précieuse |
L’Heureuse |
La Néreide |
L’Emeraude |
La Marquise |
La Sensible |
Annexe 2 : Extrait du journal de bord de juillet 1690 :
« le 7ème ,à neuf heures du matin, les galères partirent de la rade de Camaret, les vents estans S-E, temps pluvieux mais point de mer. A deux heures, mouillé à Abbrevack, dans la rivière, à sept brasses. Le vent de N-E les y arresta jusqu’au 12ème.
Le 12ème , à quatre heures et demy, les galères sortirent d’Abbreuvak, le vent estant au S-E. On trouva dehors à l’E-S-E. On porta par E-N-E avec la mestre jusqu’à l’isle de Bas. On passa entre la terre et cette isle environ dans la pleine mer, et l’on vint mouiller dans la rivière de Morlaix à deux heures d’après-midy ; affourché par cinq et six brasses, fond de sable.
Le 13ème , on partit de Morlais à quatre heures du matin, calme ; le vent se mit à E-S-E foible. On ne laissa pas de gagner la rivière de Pontrieu, où l’on mouilla à trois heures de l’après-midy, par neuf brasses, au S-E de l’Isle au Bois. Cinq Galères allèrent mouiller dans la rivière de Aquatmen par les quatre et cinq brasses. Les galères, avec une chiourme fatiguée par six heure de vogue continuelle, ne laissèrent pas de faire deux lieues et demy en quatre heures de temps, contre un vent par proue à quatre miles par heures et contre la marée.
Le 16ème à quatre heures du matin, les galères partirent de la rivière de Pontrieu et se mirent en route pour aller au raz Blanchart, par N-E ¼ N, à cinq heures, vent foible de S-O mestre et trinquet, vogue à quartier, quatre à cinq miles par heure ; à six heure, vent de S-E, mesme estime. A six heure trente du soir, les galères mouillèrent à la grande anse de Vauville, au large, le jusant commençant et les empeschant de passer le raz.
Elle serpèrent le 17ème à deux heures du matin, pour aller à la rade de Cherbourg où elles mouillèrent à cinq heures trente, par les quatre brasses et demy. »
Annexe 3 : Quelques commentaires sur le journal de Bord.
L’aberwrac’h est orthographié successivement : Abbrevack et Abbreuvak.
En rade de Morlaix les galères ont certainement mouillées dans le sud du château du Taureau.
Le jour suivant, les galères mouillent à l’embouchure du Trieux, 10 galères mouillent à proximité de l’île à bois, les 5 autres, un peu plus en amont dans la rivière, à Coatmer (Aquatmen dans le journal de bord)
Le mestre est le nom de la grand-voile latine d’une une galère , le trinquet celui de la voile latine de l’avant de surface moindre au mestre.
La vogue à quartier est la marche économique des galères : seule la moitié des rames sont en action, l’équipage, divisé en deux, rame en alternance avec un repos d’une heure à une heure et demie.
« Elle serpèrent à deux heures du matin » : Serper est lever l’ancre , mais ce mot est affecté à la navigation des galères ( dictionnaire de l’Homme d’épée chapitre navigation 1680)
Annexe 4 : Une petite analyse des marées, et de la navigation avec les courants de marée
Le 7 juillet
la basse mer du Conquet est à 11h47
La pleine mer de l’aberwrach est à coef 96
La galères partent donc deux heure avant la basse mer et prennent le chenal du four avec le courant de flot. Et arrive à mis-marée à l’aberwrach
Le 12 juillet
la basse mer de Roscoff est à 4h31
La pleine mer est 10h27 à coef 64
Les galères partent à basse mer de l’aberwrach , naviguent avec le flot, passent dans le chenal de l’ile de Batz peu après la pleine mer. Elle affrontent le début de jusant pour aller mouiller en baie de Morlaix
Le 13 juillet
la basse mer de Ploumanac’h est à 5h30
La pleine mer de Ploumanac’h est à 11h35 coef 58
Elles partent à basse mer de Morlaix et arrive à l’embouchure du Trieux 3 heures après la pleine mer , elle affronte le courant de jusant certainement depuis les Épées de Tréguier ou les Héaux de Bréhat.
L e 16 juillet
La basse mer des Héaux de Bréhat est à 8h25
La pleine mer des Héaux est à 14h44 mais le coefficient est faible de 40, les galères partent à 4h du matin profite du jusant pour sortir du chenal du Trieux puis du flot pour faire cap au NE
Le 17 juillet
la basse mer de Cherbourg est à 0h03
la pleine mer de Cherbourg est à 5h25 avec un coef de 44. Ce qui explique cette navigation nocturne.
Annexe 3 deux articles passionnants
Des exploits en construction navale aux XVIIème siècle
Construction en 24 heures d’une galère
Construction en moins de deux jours d’une frégate dans les trois arsenaux Brest Rochefort et Toulon
Construction de 15 galères à Rochefort en mois pour un arsenal qui n’avait jamais construit de galère
Sources :
La navigation des galères de Ponant de Rochefort à Cherbourg de Charles Bréard édité en 1893 (collection personnelle)
Essais de pratique industrielle dans la construction navale au XVIIe siècle René Burlet; José-Paul Verne (web http://www.persee.fr)
Mais comment pouvait-on ramer sur les galères du Roi-Soleil ? (web http://www.persee.fr)
Album de Colbert 1670
« Charpentier de marine au pays de Saint-Malo » Jacques Morin édition Jean Picollec
Site de Gérard Delacroix, auteur de monographies et modéliste naval émérite
http://gerard.delacroix.pagesperso-orange.fr/sommaire.htm
La victoire en demi-teinte des Français à la bataille de Bévéziers
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_du_cap_B%C3%A9veziers
La canonnière 93 devait escorter, de Perros à l’île de Bas, sept à huit navires chargés de grain et destinés à approvisionner les magasins des vivres de la marine au port de Brest .
Notre canonnière était une de ces embarcation longues et plates que Napoléon avait construire par milliers, pour opérer cette gigantesque descente que tant de circonstances firent manquer. Plus tard on avait cherché à utiliser les grandes chaloupes de la flottille, en leur plantant une haute mâture de brick de guerre, et en remplaçant leur trois fortes pièces de 36 par une douzaine de petits canons de 4 ; elles qui, étroites et longues, ne calaient que quatre à cinq pieds d’eau ! Plusieurs de ces pauvres chaloupes canonnières, si fastueusement gréées, chavirèrent sous le poids de leur haute mâture, et payèrent bien cruellement ainsi l’honneur d’avoir voulu s’égaler aux grands bricks de l’État.
Aussi fallait-il voir la vigilance que mettaient les officiers embarqués sur ces bateaux, si peu stables, à prévenir le moindres grains ! A peine un nuage d’élevait-il un peu rapidement sur l’horizon ; à peine la brise venait-elle à verdir la mer, ou à frémir dans le gréement, qu’on amenait tout à bord, de peur de faire chavirer la barque sous l’effort de la risée. On savait qu’il en allait de la vie, et c’était avec prudence que l’on jouait sur les flots cette partie dans laquelle l’existence de tout un équipage est mise si souvent en jeu.
Les vents étaient au sud-est lorsque nous appareillâmes de Perros avec notre petit convoi. Le matin on s’était assuré, en montant au sémaphore, guindé sur la partie la plus élevé de la côte, qu’il n’y avait aucun ennemi en vue. La plus parfaite tranquillité régnait au large sur les flots : la brise était ronde, la journée paraissait devoir rester belle. En un clin d’œil nous fûmes sous voiles, laissant les Sept-Îles par notre côté tribord, et longeant, avec nos bâtiments bien alliés, la côte de Lannion par bâbord. Les rochers arides que blanchissaient de belles vagues étincelantes au soleil de mai défilaient déjà à nos yeux, et à chaque minute les formes bizarres du rivage changeaient d’aspect et de perspective. Rien n’est plus piquant, sous un ciel serein que de voir ainsi la terre se métamorphoser sans cesse, et revêtir les couleurs et les configurations les plus diverses. C’est un vaste panorama que la mer encadre avec son mirage, ses riants fantômes, et dont le navire est le centre. Aucune illusion d’optique ne peut rendre ce spectacle, si différent quelquefois pour les gens qui se sont fait une habitude de naviguer au milieu des miracles de perspective et des prodiges de l’Océan.
Vers midi, le vent, qui depuis notre départ avait paru vouloir tomber, passa définitivement au sud, en faisant défiler, sous le ciel devenu grisâtre, de gros nuages chargés de pluie. Une brume épaisse s’étendit, comme un rideau, sur le groupe des Sept-Îles que nous laissions déjà derrière nous, et sur la côte qui ne se montrait plus à l’horizon que comme un banc de fumée. La brise qui nous poussait au large, nous contraignit de louvoyer, non plus pour nous rendre à l’île de Bas, mais bien pour tâcher de gagner un mouillage à terre.
Notre capitaine, brave officier, élevé dans les dangers de sa profession et accoutumé à supporter toutes les contrariétés du métier, se montra soucieux dès cet instant. Il nous ordonnait avec inquiétude de bien regarder autour du navire. Il semblait prévoir l’événement que le sort nous réservait.
Quand à nos pauvre bâtiments du convoi, ils louvoyaient aussi en ayant soin de ne pas nous perdre de vue. Ils paraissaient craindre l’approche de quelque croiseur, et rechercher par instinct notre protection contre tout événement possible ; car alors les croiseurs anglais ne manquaient pas de rôder, en vrai loups, autour des faibles troupeaux de petits bâtiments que nous hasardions quelquefois à faire sortir de nos ports.
A dix heures on vint nous annoncer que le déjeuner était servi dans la chambre . le capitaine ne voulut pas descendre : l’officier de quart resta sur le pont pour lui tenir compagnie et pour faire virer de bord la canonnière, chaque fois que le pilote côtier venait conseiller d’envoyer vent devant.
Nous étions assis depuis quelques minutes autour de la table du déjeuner, lorsque nous entendîmes sur le pont un mouvement extraordinaire. Nous montâmes tous. Ceux des navires du convoi qui se trouvaient à terre de nous, venaient de laisser arriver à plat sur la canonnière. Malgré l’épaisseur de la brume, ils avaient aperçu au vent à eux un grand navire qui ne faisait pas partie du convoi. Nous jetons les yeux sur le point qu’ils nous indiquent. La parole nous manquait pour nous dire l’un à l’autre ce que nous venions de découvrir…
Une haute voilure de brick nous apparait dans la brume, sous une forme aérienne. Cette voilure, avec ces contours imposants, filait avec vitesse, comme un gros nuage noir que le vent aurait poussé silencieusement au dessus des flots. Bientôt le brick , que nous vouions par son travers, laisse porter sur le groupe des navires que nous escortions. C’est probablement le corsaire le « Jean-Bart », disons nous, qui mouillé depuis longtemps à l’île de bas sera parti ce matin pour retourner à Saint-Malo. Nous nous flattions trop ; mais comment penser qu’un bâtiment ennemi osât, avec un temps pareil, approcher aussi près une côte aussi dangereuse ! comment supposer que sur ces mers, où quelques heures auparavant nous n’avions pas vu un seul navire , un brick anglais fût parvenu aussitôt à ce placer sous terre ? On ordonne le branle-bas de combat à notre bord. Le capitaine passe sur l’avant , un porte-voix à la main. Il crie aux bâtiments du convoi :« Continuez de louvoyer, et si l’un de vous amène pour le brick en vue, je le coule à fond. »
Le moyen de choisir, si c’est un bâtiment ennemi ? Coulé par le brick s’ils n’amènent pas, ou coulés par notre canonnière s’ils amènent, nos navires se décident toutefois à louvoyer pour regagner la côte. Notre anxiété ne peut se peindre , nous si faibles et surpris au large par un navire qui parait être si fort ! Qu’allons nous devenir ?
Il n’était que trop fort, en effet, ce brick qui déjà nous laisse voir une batterie très haute, au dessus des lames qui clapotent à peine au ras de ses sabords, ouverts comme une gueule béante qui s’apprête à vomir du sang et des flamme.
Notre malheureux capitaine sentit qu’il fallait se sacrifier pour sauver le convoi qui lui avait été confié. Il ordonna de commencer le feu et de pointer juste.
Deux ou trois grosses lames passent sous la canonnière ; on attend l’embellie, le navire sera plus stable. Ce moment arrive, et nous envoyons par tribord cinq coup de canon de 4 au brick anglais, qui parait à peine en être effleuré. Cette agression semble le mettre à l’aise ; il revient un peu au vent, en nous laissant voir à sa corne la queue d’un large pavillon rouge ; puis après nous entendons éclater, au milieu d’un nuage de fumée blanche que vomit sa batterie, un lourd coup de foudre. Des cris partent de notre bord ; la mitraille a sifflé à nos oreilles : elle a frappé plusieurs de nos hommes. Un mât de hune tombe : Le capitaine hurle au porte-voix : « Enlevez les blessés ! feu tribord ! »
Nous faisons feu ; mais le fracas de l’artillerie du brick couvrait le bruit de nos petites pièces. Le combat est engagé : le brick nous approche à demi-portée de pistolet ; il masque son grand hunier pour ne pas nous dépasser, et dans cette position, les sifflets perçants des maitres se font entendre : c’est le moment fatal. Une grêle de boulets et de mitraille tombe sur notre pont, balaie nos gaillards et nos passavants. Cette position n’était plus tenable ; et, loin d’amener, notre capitaine nous fait entendre au contraire ce cris terrible :« A l’abordage ! A l’abordage !»
Dans un moment de calme et d’affaissement, une petite voix vient glapir au panneau. C’est un mousse qui crie : « Nous coulons ! Nous coulons ! la cale est pleine d’eau ! » les boulets de 32 du brick, pointé à la flottaison , nous avaient percés de part en part : chaque projectile avait fait deux trous par lequel l’eau entrait par notre cale comme dans une citerne.
La barre de la canonnière est poussée à bâbord ; le capitaine lui-même aide les timoniers à faire ce mouvement ; avec l’aire que conserve encore le navire à moitié coulé, nous revenons au vent et nous abordons le brick qui nous présente le travers. Mais qui montera à l’abordage? Il ne reste tout au plus que quinze à seize combattants sur notre pont, de tout un équipage de cinquante hommes. Les Anglais prennent le parti de descendre à notre bord : ils tombent par groupes sur nous . Notre capitaine, furieux, se précipite devant d’eux : un coup de sabre lui fait voler le sommet de la tête ; deux coups de feux l’étendent mort. Les briquets voltigent sur nos têtes, les coups de feu pleuvent de tous côtés. Il n’ya plus que des morts, des blessés et des Anglais sur notre canonnière, qui menace de couler avec les vainqueurs et les vaincus. Le brick s’éloigne d’elle, laissant à notre bord les deux tiers de l’équipage qui nous a mitraillés, hachés et coulés.
Bientôt heureusement les embarcations du brick sont mises à la mer : elle recueillent nos blessés. On nous transporte à bord du bâtiment ennemi. Le capitaine anglais nous reçoit avec flegme, avec un peu de dédain même : ses hommes étaient occupés à fourbir les batteries des caronades qui venaient de nous foudroyer, et à enlever sur le pont les taches du sang que notre feu avait fait couler. Le navire qui venait de nous traiter ainsi se nommait le Scylla, capitaine Arthur Atchisson. Il avait vingt caronades de 32 en batterie, et cent vingt-cinq hommes d’équipage : il n’en fallait pas tant pour nous.
Le capitaine Atchisson fit appeler notre second, qui n’était que légèrement blessé : il ordonne à un grand homme sec, qui parlait français, d’adresser à cet officier les questions suivantes :
« Pourquoi avez-vous résister avec si peu de monde et un navire si faible, au brick que vous voyez ?
Parce qu’il a plu à notre capitaine de le faire. Dite à notre commandant que je suis son prisonnier, mais que je n’ai aucun compte à lui rendre.
Le capitaine Atchisson m’ordonne de vous demander quelle était votre intention en cherchant à l’attirer sur les roches de Kérialiès ?
Notre intention était de vous faire vous jeter sur les rochers, et de nous donner le plaisir de vous voir vous noyer en nous sauvant.
Le capitaine me dit de vous répondre qu’il connaissait la côte tout aussi bien que vous, parce qu’il a à bord un pilote français.
Et quel est ce pilote ?
C’est moi.
En ce cas , dites à votre capitaine que vous êtes une lâche canaille, et que je vous méprise trop pour répondre désormais aux questions qui me seraient faites par la bouche d’un traitre de votre espèce.»
Le commandant Anglais, devinant le sentiment que venait d’exprimer notre second, le retient par le bras et l’attire avec lui sur l’arrière, en ordonnant qu’on aille chercher le master.
Le master parait : il s’exprime assez bien en français. Après avoir causé un instant avec son commandant, il dit à notre second :
« le commandant me charge, monsieur le lieutenant, de vous présenter ses excuses, et de vous assurer qu’il méprise, autant que vous pouvez le faire vous-même, le pilote français à qui vous attribuez avec raison votre perte. C’est un traitre dont nous nous sommes servis, mais que l’on paie et que l’on ne peut estimer. Pendant tout le temps que vous passerez à bord, il lui sera interdit de paraitre sur le gaillard d’arrière : c’est l’ordre du capitaine Atchisson, qui m’invite aussi à vous demander si vous voulez lui donner la main et accepter sa table.» Nous vîmes, après ces paroles, notre second et le capitaine anglais se donner affectueusement une poignée de main.
Nous fûmes traités à bord de la Scylla avec tous les égards possibles.
Quand à notre pauvre canonnière, quelques heures après notre combat, elle coula, malgré toutes les peines que s’était données les Anglais pour la maintenir sur l’eau comme un trophée de leur victoire : elle coula avec nos morts sur le pont ! Le navire, que ces pauvres gens avaient défendu jusqu’au dernier soupir, leur servit de tombeau, et le pavillon, que personne n’avait songé à amener, disparut au bout du pic, sous les flots que le sang de tant d’hommes avait rougis.
Pendant la nuit, à l’heure ou les anglais nous croyaient endormis, nous entendîmes sur le pont le bruit sourd de plusieurs voix qui semblaient réciter des prières ; et puis ensuite on faisait silence, et des objets qui paraissaient d’un grand pois étaient lancés à la mer : c’était leurs morts que les Anglais jetaient ainsi par–dessus le bord, mais avec mystère, pour nous cacher le mal que nous leur avions fait dans ce combat si inégal : c’était là une de ces coquetteries de guerre, que l’on n’épargne pas même aux vaincus.
Trois jours après notre action, nous fûmes plongés, blessés, sans effets, sans secours, dans les prisons de guerre de Plymouth.
Edouard Corbière
Dans « La France maritime » Amedé Gréhant T1 1837 page 184
Ce récit a été également publié dans la mer et les marins d’Edouard Corbière en 1833
Second document :
Lettre du capitaine Achison, Commandant du brick de S.M. le Scylla, adressé à l’amiral Sir Robert Calder Commandant en Chef à Plymouth.
A bord du brick de S. M. le Scylla, parmi les rochers des Triagos, à la hauteur de Morlaix, le 8 mai 1811.
Monsieur,
J’ai le plaisir de vous informer qu’étant très près de l’Isle de Bas ce matin à neuf heures et demie, j’ai aperçu un brick de guerre ayant cinq voiles sous son escorte, sous le vent, et lui ai donné chasse immédiatement ; à onze heures et demie, je l’ai atteint, et j’ai commencé à tirer sur lui et sur son convoi : à onze heure 45 minutes, voyant que nous étions parmi les rochers de Triagos et de Pontgalo, et qu’il était déterminé à s’échouer à la côte, j’ai été obligé de l’élonger, filant alors huit nœuds à l’heure ; deux minutes après nous en avons pris possession, mais après que son premier capitaine, un élève, le bosseman et deux marins ont été tués ; un élève et cinq matelots blessés dangereusement, et cinq matelots blessé légèrement. C’est la canonnière, brick national Français, portant dix canons de 4lb. Et quatre pierriers, avec un équipage complet de 77 hommes, il était commandé par M. Jean Joseph Benoit Schilds, enseigne de vaisseau, et n’était sorti que depuis deux heures de Perros pour aller à Brest. Je crois que si nous eussions été loin de la terre, il n’aurait pas tiré un seul coup de canon, mais l’ennemi étant près de la côte, et espérant de pouvoir s’y échouer, avivement combattu ; et je suis fâché d’avoir à dire que le Scylla a eu deux hommes tués, un garde-marine et un soldat légèrement blessés. Je n’ai pu m’emparer que d’un vaisseau de son convoi, chargé de froment, les quatre autres s’étant échappés à travers les rochers, et ayant échoué à la côte ; j’ai même été bien aise, vu le mauvais état de la canonnière, et le vent et la marée devenant plus fort, de pouvoir me retirer d’où j’étais, avec ce que j’avais pris.
J’ai beaucoup de satisfaction à dire que dans cette petite action, M. Speck, premier lieutenant, aionsi que tous les officiers et marins que j’ai l’honneur de commander, ont fait tout ce qu’ils pouvaient faire ; je serais fier de trouver une occasion où ils pussent se montrer avec plus d’avantage.
J’ai l’honneur …….
A Atchison
The European magazine and London review London 1811
Et sa traduction en français dans « L’ambigu ou variétés littéraires et politiques » Londres 1811
Commentaires
Le 8 mai 1811, la marée du matin est de coefficient 94 la PM de Ploumanac’h est à 7h41 le matin la basse mer à 13h31. Le convoi par de Perros avec le courant de jusant qui le porte dans l’ouest
Edouard Corbière est premier aspirant à bord de la canonnière 93 il a alors 18 ans et a déjà derrière lui 7 ans de navigation sur différents petits navires de l’état
En comparant les deux sources, racontant ce combat , l’on s’aperçois qu’Edouard Corbière à travers sa description particulièrement vivante exagère considérablement les pertes française qu’il porte à 35 personnes alors que le rapport du capitaine Anglais Atchison n’en dénombre que 5 tués et 6 blessés sérieux pour les Français et 2 tués pour l’équipage Anglais.
Corbière parle d’un convoi de 6 à 7 voiles, Atchison de 5 navires
Situation du combat :
Au sud des Triagoz, dans un triangle délimité : à l’ouest par Pongaro, limite nord du plateau de la Méloine , au nord par la roche blanche, roche supportant aujourd’hui le phare des Triagoz qui n’existait pas bien sur à l’époque du combat, et à l’est le mouillage keralies en Pleumeur Bodou
Pongaro :
Roche la plus au large de la baie de Lannion ; car nous regardons pas la Feuillie et les Triagons comme faisant comme faisant partie des dangers de cette baie.
Le Pongaro est au NO du Nocéier, un peu plus ½ lieue, et au NE ¼ N ¾ de lieue de la grande Méloine ; ses marques sont de relever vers le SE le moulin des Guilers par le milieu de l’île de Milio. Ce moulin s’aperçoit au S de la paroisse de Tréborden. De l’autre coté, vers le SO, il faut apercevoir la pointe Arcoestel en dedans de la petite île de Dipen. Cette ligne doit passer sur la partie du S de la grande Méloine ; on peut naviguer tout autour de Pongaro, on trouve 7 à 21 brasses à son acore.
« Dictionnaire universel de géographie maritime » par L. de Grandpré 1803
« Le 8 du mois, à huit heures du matin, un convoi Français de huit voiles, étant sorti de Perros pour se rendre à Brest, à 10 heures et demi, ce convoi à été attaqué près des rochers nommés les myroines, par une corvette Anglaise, venant de l’ouest alors la mer était couverte d’un brouillard épais qui s’était élevé il y avait une heure, à la faveur du brouillard, cette Corvette a surpris le convoi, qui n’était escorté que par une seule canonnière, ordinairement stationnée à Perros, Le combat s’étant engagé a duré environ une heure et demie ; quoi qu’il n’ait eu lieu qu’à 2 myriamètres de la place des 7 Iles il a été impossible d’en pouvoir distinguer les mouvements à cause de la brume ; à midi cette brume ayant disparue, nous avons aperçu la canonnière Française ayant le mât de hune de son grand mât abattu, étant aussi endommagée par son derrière, la corvette Anglaise la remorquant il y avait aussi à sa suite un sloop du convoi d’environ 50 tonneaux Le même que la canonnière avait remorqué quelque temps avant le combat. La corvette à fait route au nord avec ses deux prises. Disparu ensemble à 6 heures du soir. Pendant le combat les six autres navires du convoi se sont heureusement sauvés dans la Baye de Lannion.
A 2 heures après midi, une autres corvette et un lougre ont paru au nord-est , ont croisé à deux myriamètres des 7 iles jusqu’à la nuit et ont disparu au Nord »
J’ai l’honneur de vous Saluer très respectueusement
Buhot
Rapport sur les mouvements des navires ennemis à la vue des Sept-Îles, le 9 mai 1811, Archives Départementales des Côtes-d'Armor, 7 R 1-85, Marine et garde-côtes
Source du complément
http://patrimoine.region-bretagne.fr/main.xsp
Site de l’inventaire du Patrimoine région Bretagne
Fortifications littorales : les batteries de côte, les corps de garde, les poudrières et les guérites.