Ouest Eclair du 21 janvier 1933
La veilleuse qui s’éteint
La première et la plus ancienne des gardiennes de phare vient de mourir à Bréhat (Côtes-du-Nord)
Mercredi dernier la population de Bréhat, émue et recueillie a conduit à sa dernière demeure Marie-Perrine Durand, la première femme gardien de phare et la doyenne des veilleuses de France.
De l’extrême pointe nord de l’île où se dresse tout blanc, au-dessus des rochers rouges, le phare du Paon, le cortège s’en alla lentement, au pas mesuré des porteurs jusqu’à la petite église, cet autre phare qui éclaire le souvenir des vivants et guide vers le champ des morts l’ombre des péris en mer.
Dimanche même, nous signalions à la bienveillance de nos lecteurs la vie de dévouement de cette admirable vestale plus qu’octogénaire : le lendemain même, l’Ankou jalouse venait chercher celle qu’elle semblait avoir oubliée sur les rochers perdus.
Lorsque la fille dévouée de la vieille gardienne en allant faire une ronde, passa près de sa mère, elle la trouva déjà froide ; Marie –Perrine Durand était morte doucement, comme un phare qui s’éteint quand l’aurore est venue.
Quelques jours avant, elle faisait encore à deux visiteurs les honneurs de son gîte marin et souvent la nuit, malgré les observations affectueuse de sa fille, elle montait les soixante-dix marches de granit qui conduisent à la dunette illuminée de ce vaisseau de pierres.
Et aujourd’hui, dans la vigie endeuillée et encore plus isolée, semble-t-il, je n’ai trouvé qu’une fille éplorée qui bientôt lorsque son frère sera reparti au long-cours, devra continuer seule sa garde vigilante.
Gardienne de phare pendant quarante-cinq ans
« Ma mère, nous dit-elle, avait 25 ans lorsqu’elle se maria : mon père était alors gardien du phare des Triagoz, à plus de 20 milles de Trégastel ; neuf ans plus tard, il devait mourir subitement pendant l’une de ses veilles, des suites d’une chute, le long des rochers, un jour de tempête. Ma pauvre mère restait alors veuve avec cinq enfants dont l’ainé avait 8 ans et le dernier 3 mois. »
« Elle n’avait aucune ressource et ne savait qu’un métier : celui de son mari ; elle fit une demande, passa un examen ; après deux ans d’attente, elle fut enfin nommée au phare du Rosédo et c’est ainsi qu’elle fut la première femme à qui l’on confia un feu.
Plus tard elle fera école et c’est à elle que l’Etat confiera les postulantes.
Cinq gardiennes de phare seront formées par elle, dont Mme Kerambrun, aujourd’hui plus que septuagénaire et deux de ses filles Mme veuve Taldu titulaire au phare de Port-La –Chaine en Pleubian et Mlle Aline Durand, l’actuelle gardienne du phare du Paon.
Mais tout n’était pas drôle alors. pour les trente francs par mois de salaire qu’elle octroyait maigrement, l’administration se montrait d’une intransigeance et d’une sévérité excessives. a tout heure du jour et de la nuit, des inspecteurs de toutes sortes et de tous grades venaient frapper à la porte du modeste logis où s’abritaient la gardienne et ses cinq petits-enfants. L’habitation devait être d’une propreté méticuleuse ; la cuisine même devait être cirée comme un vieux meuble patiné et souvent nous confie Mlle Aline Durand, ma mère dut étendre ses draps par terre pour que nous n’abimions pas le parquet.
Cependant, avec ses trente francs par mois et une pension de 129 francs par an, la pauvre veuve devait équilibrer son budget et nourrir ses enfants qu’affamait le grand air du large. Souvent ce fut elle qui se priva et qui devait se contenter d’une simple tasse de café pour que ses petits n’aient pas faim.
Cinq ans et demi après, Marie-Perrine Durand venait du Rosédo au phare du Pan, qu’elle ne devait quitter qu’à sa mort.
Là pendant trente-neuf ans, elle remplit ponctuellement sa modeste tache et il n’est pas besoin d’insister sur ce que tout cela représente d’héroïsme obscur et d’abnégation quotidienne.
Une vision de cauchemar
En essuyant ses larmes, Mlle Aline Durand veut bien encore nous raconter quelques souvenirs :
« Une nuit, pendant la guerre, nous eûmes notre attention attirée par les coups de sirène désespérés d’un chalutier que nous avions aperçu quelques instants auparavant. Il venait d’être torpillé par un sous-marin allemand et les infortunés marins n’eurent que le temps de se jeter à la mer. Bravant tous les dangers, trois autres chalutiers se portèrent au secours des malheureux naufragés qui se débattaient dans l’eau glauque.
« D’autres fois, ce sont de pauvres cadavres qui viennent s’échouer dans quelques faille comme pour nous quémander une sépulture.
Mais cette solitude ne vous pèse-t-elle pas trop certains jours ?
Que voulez-vous que nous désirions ? Nous n’avons jamais connu autre chose. Et puis, nous ne sommes pas encore les plus malheureux : songez aux gardiens des phares en pleine mer eux qui sont là quarante-cinq jours sans être relevés, et son doigt pointe vers la mer, comme pour nous indiquer toutes ces prisons de pierres que sont les phares d »Ar-Men, des Pierres-Noires, de Kéréon, La Jument, La Vielle
Mais si dans cette solitude vous tombiez malade ?
Mlle Aline Durand nous regarde avec de grands yeux étonnés.
- « D’abord le service, nous aurions toujours assez de volonté pour accomplir notre tâche. Un jour pendant la guerre, alors que nous assurions, ma mère et moi, la garde des deux phares de l’île, je me trouvais seule à celui du Rosédo. Je fus prise d’une crise aigüe d’appendicite et, pour aller remonter le poids qui réglait la marche des feux, je dus grimper l’escalier, tantôt assise, tantôt en me trainant à quatre pattes. Le lendemain seulement je pus aller chercher du secours. et voyez j’en ai tout de même réchappé »
C’est d’ailleurs la seule chose qui semble quelque peu extraordinaire à Mlle Aline Durand, tellement est profonde et sincère sa notion du devoir.
Celle qui fut sa mère, son éducatrice, et qui restera son n’est plus. Mère de cinq enfants : trois marins dont deux péris en mer, deux gardiennes de phare, vestale vigilante elle-même pendant quarante-cinq ans, elle est partie sans la plus modeste récompense, avec la seule vénération des dévoués inspecteurs des phares et de la courageuse population bréhatine. Toute la population de Bretagne se fût trouvée honorée si quelque ministre avait eu un jour la pensée d’épingler sur le châle de la vieille gardienne la simple croix du Mérite Maritime.
N’est-ce donc pas pour honorer de tels dévouements que cette croix avait été créée ?
Pierre Cressard 1933
Commentaires et liens :
Gardien de phare, métier masculin ? L’image classique du gardien du feu, un homme dans un phare en mer est bien n’est pas un cliché. Les feux isolés en mer ainsi que les feux du premier ordre (les feux les plus importants et les plus puissants) étaient gardiennés par des hommes. Mais de nombreux feux à terre de second ordre étaient gardienné aussi par des femmes. Souvent épouse ou fille du gardien en titre elle prenne le relais et la responsabilité du phare au décès de celui-ci. Elles sont assez nombreuses et représente dans le Morbihan un tiers des effectif des gardiens à terre.
Témoignage d’Anna Lebail gardienne de phare de Crac’h à St Philibert dans le Morbihan : Document INA
Phare du Paon: Notice de l'inventaire du patrimoine des Archives Départementales des Côtes d'Armor
Dans le nord-est de Bréhat, entre l’île et le plateau des Roches Douvre il y a deux plateaux de rochers particulièrement dangereux : La Horaine et plus loin Barnouic. Ils sont sur la route de Paimpol de la baie de Saint-Brieuc, et de Saint-Malo pour les navires venant de l’Ouest.
Pour la Horaine, les conditions de mer et de courant sont particulièrement violentes.
En 1832 une première balise en bois y est implanté elle ne durera pas 15 jours Puis une balise en fer en 1849, en 1859 une tentative de construction d’une tourelle en maçonnerie qui ne tient pas non plus. En 1890 une nouvelle balise en fer de 16cm de diamètre ne résiste pas non plus. L’administration des phares et balises étudie l’implantation d’un phare en pierres gardienné. Le cout d’une telle construction est très important et nous sommes au début de grands changement pour les feux en mer : des constructions en béton et des premiers feux permanents, le choix est donc porté dans ce sens.
Allumé le 12 décembre 1897, nous allons découvrir par les deux articles d’époque suivants la construction et le fonctionnement de cette tourelle avec son feu.
La Tour-Balise de la Horaine à Bréhat
La Horaine de Bréhat est un plateau rocheux qui s’étend sur 2 kilomètres environ à 4 milles à l’Est [Nord] de l’île de Bréhat. Ces roches, du schiste micacé aux pointes aigues, aux arrêtes coupantes, découvrent plus ou moins à marée basse ; mais lorsque le flot a dépassé la hauteur de mi- marée, rien n’indique plus au navigateur la présence de ces écueils, d’autant plus dangereux qu’en ces parages les brumes sont fréquentes, le courant est violent (10 nœuds), que, sans étale, à l’heure de la pleine mer, le flot se renverse et fait place au jusant, qu’à la moindre brise, enfin, la mer est démontée. Or la Horaine commande le port de Paimpol par quelque route qu’on y accède.
Tous les essais tentés depuis de longues années pour baliser ces écueils avaient échoué sous le choc violent des lames. Un mât en fer plein de 10 centimètre de diamètre destiné, par l’adjonction d’un voyant à former balise, fut brisé par la mer, à un mètre au-dessus du roc dans lequel on l’avait péniblement implanté. on pensa, en 1880, résoudre le problème par l’érection d’une tour métallique hexagonale, et pour en recevoir les montants, six trous furent forés dans le roc. Une poutre en fer, d’un diamètre de 16 centimètres, y fut placée à titre d’essai. Dans un coup de vent, elle fut tordue à angle droit, au ras du rocher.
La conclusion s’imposait : à une construction en maçonnerie seule, on pourrait donner une masse assez considérable pour opposer une résistance suffisante au choc de rupture des lames. la roche qui parut la plus favorable pour y établir cet ouvrage, et qui fut choisie après de longues études, ne découvre que de 3m 50 dans les plus grande marée d’équinoxe. les fondations devant être descendues à 1 m 25 du niveau des plus basses mers de vive eau, on ne disposait pour ce travail que de quatre journées par mois, et, encore pendant une heure chaque fois, à condition, enfin, que le temps fût calme. Employer les procéder ordinaires il n’y fallait pas songer ; le travail aurait été emporté par la mer. On résolut donc de couler sur le roc une tourelle en béton, de forme octogonale, inscrite à la base dans un cercle de 6 m 20 de diamètre et mesurant 15 mètres de hauteur.
Une enceinte de briques que l’on remplit de béton fait de ciment Portland à prise lente et de tout-venant (galets recueillis sur les plages voisines) fut élevée jusqu’au niveau du rocher, formant ainsi une sorte de piédestal à la tourelle. Pour l’édification de celle-ci, on plaça à chaque angle des arêtiers en fonte de 45 centimètres de hauteur, et que l’on fixa fortement dans le béton formant la base. Ces arêtiers portaient des rainures dans lesquelles on coinçait fortement madriers en sapin. On obtenait ainsi une enceinte très résistante dans laquelle on coulait le béton ; au fur et à mesure que la tourelle s’élevait, on démontait les arêtiers inférieurs, on les superposait aux arêtiers supérieurs, et, les maintenant par trois boulons serrés à bloc, les reliant par des madriers, on obtenait une sorte de moule qui montait en même temps que la construction.
A chaque marée, une plate-forme était installée à l’extérieur de l’enceinte, pour recevoir les matériaux en sacs jaugés à l’avance et que l’on hissait au moyen d’un mât, rapidement installé, avec une corne sur laquelle avait été frappé un palan, qui les allait prendre soit sur la roche où on les avait déposés, soit dans les embarcations qui les avaient apportés. Une pompe, placée extérieurement, amenait dans une cuve suspendue hors de l’enceinte, l’eau nécessaire à la confection du mortier que l’on faisait sur des aires en bois. En deux campagne, 1894 et 1895, on put travailler soixante-cinq jours, et terminer la tourelle, dont un coup de vent, au mois de septembre 1894, avait prouvé la solidité, car il avait rasé les panneaux de bois placé pour protéger le béton frais contre le déferlement de la mer, s’il avait fait sauter quelques-uns des madriers formant l’enceinte, il n’avait rien pu contre le massif de béton, constituant ce qui existait alors de la tour balise. Le pavillon français, en signe d’achèvement, a été hissé sur la tourelle de la Horaine à la fin d’aout dernier [1895], et on y a installé au printemps suivant un feu permanent à l’huile minérale, qui brule jour et nuit, sans gardien.
On sait que le service des phares et balises a allumé un certain nombre de feux de cette nature, qui brûlent pendant plus de trois mois sans avoir besoin d’être rechargés ; en les visitant, néanmoins, tous les mois, on peut être assuré qu’ils accompliront le service qu’on leur demande en des points dangereux ou d’un intérêt secondaire, sur lesquels il n’est pas possible ou urgent d’entretenir un gardien à demeure, bien qu’il soit nécessaire d’y établir un feu indiquant, la nuit, la présence d’un ouvrage fixe/
Grâces à la tour balise et au feu qui l’éclaire, les marins pourront donc éviter de se mettre au plein sur le plateau de la Horaine, l’un des récifs les plus dangereux parmi ceux qui pullulent sur les Côtes du nord.
Ce résultat, ils le devront au personnel si dévoué du service des phares et balises, qui là, comme toujours, ne s’est pas laissé rebuter par aucune difficulté, n’a reculé devant aucun danger pour accomplir cette œuvre d’un intérêt général. Lorsqu’on songe qu’à chaque voyage fait à la Horaine, qu’à la moindre saute de vent, les braves gens qui construisaient la tourelle risquaient leur vie, on ne peut qu’applaudir à la nomination au grade de chevalier de la Légion d’honneur de M. Lecoq, conducteur des ponts et chaussées, qui en dirigeait les travaux et dut, en l’occurrence, allier à la science de l’ingénieur l’expérience et le sang-froid du marin consommé ; l’on ne peut également que se réjouir des gratifications accordées à ses modestes collaborateurs, des humbles, dont elles sont venues récompenser le décvouement, l’entente et l’entrain parfaits.
F. Chenieau
La science illustrée du 06 juin 1896
La Horaine
Nous revenions de Roches Douvres sur le Fresnel, navire baliseur des Ponts et Chaussées. le soir tombait. Des feux piles s’allumaient sur la mer : au large, la Corbière de Jersey ; devant nous, sur une ligne de haut fonds, les Triagoz, les Héaux de Bréhat, les Sept-Îles, le Pan , Rosédo… L’intensité des feux augmenta avec la nuit. On ne voyait plus sur l’horizon les grisâtres fantômes des tours ; leur front seul rayonnait mystérieusement : c’était une émeraude ici ; un rubis là-bas ; plus loin comme une goutte de clarté blanche suspendue à fleur d’eau, et l’on eût dit que des étoiles inconnues sortaient de la mer et que l’étrave du navire faisait lever l’une après l’autre.
Pourtant, à quelques milles de Bréhat, dans le secteur rouge des Héaux, une forme noire apparut. Notre capitaine, qui connait par cœur tous les récifs de cette côte dangereuse, avait dirigé le navire à la raser. On distinguait maintenant une grande colonne de granit, l’échelle extérieure scellée à son flanc, la plateforme circulaire et la lanterne d’un phare. Mais cette lanterne restait sombre : aucun feu n’y brillait.
« C’est la Horaine ». nous dit, M. Baron , l’aimable et distingué conducteur des Ponts et Chaussées qui nous servait de guide aux Roches Douvres, « La Horaine où se sont perdus tant de navire et qui attend plus qu’un ordre de la direction pour s’éclairer, devenir un conseiller de prudence, un avertisseur ; après avoir été durant tant de siècle, le bandit caché à ras d’eau qui guette sournoisement le naufrage.
L’ordre est venu une première fois, il y a quinze jours ; mais ce n’est pas une petite affaire d’aborder la Horaine en hiver. Nulle part la mer n’est plus mauvaise ; brouillée de courants livides, sillonnée de haut fonds, elle multiplie ses houles autour de l’écueil. Il fallut remettre l’accostage : c’est d’hier seulement que la Horaine est allumée. Sur la lugubre procession de récifs qui cernent l’entrée du Trieux, son cierge blanc met une flamme de salut.
Une particularité du nouveau phare, c’est que situé en pleine mer, à trois milles au large dans le Nord-Est de Bréhat, il fonctionne seul néanmoins et sans l’aide d’aucun gardien permanent. On hésitait à le construire ; le courant de flot, qui porte violemment sur la Horaine, ne permet guère d’y travailler qu’en été, aux basses mers, et avec la perspective de voir quelquefois tout le labeur de plusieurs semaines ruiné en une seule nuit.
L’administration des phares, nous disait M. Baron, s’est longtemps bornée à déterminer la position de l’écueil au moyen de l’alignement des deux feux de Bréhat, le Pan et le Rosédo, et d’un secteur de lumière rouge émise par les Héaux. On tenta bien à différente reprises de faire tenir une balise en fer sur la tête la plus importante de l’écueil. Cette balise, scellée dans le roc, a été démolie par les lames et il n’en reste plus qu’un tronçon tordu de 0m 12 de diamètre.
Vous jugez par là des difficultés que présentait la construction d’un phare en un endroit aussi exposé. On les a surmontées pourtant, à force de persévérance. La tour actuelle, toute en béton à 17 m de hauteur. Fondée sur le roc, à 4 mètre au-dessus du niveau des basses mers, elle émerge d’environ 9 mètres au-dessus des plus hautes mers d’équinoxe. Comme la tour n’est qu’un massif complétement plein et qu’on ne peut accéder à la lanterne qu’au moyen d’une échelle en fer scellées le long de la maçonnerie, on a dû installer dans cette lanterne un appareil d’éclairage permanent. Un réservoir disposé au-dessus de l’appareil contient à cet effet un approvisionnement de pétrole suffisant pour assurer la consommation du bec pendant une période de cinquante jours environ. de plus, et afin de donner au nouveau phare un caractère tout spécial ne permettant pas de le confondre avec les feux avoisinants, on a concentré en trois points, au moyen d’un réflecteur et de trois panneaux lenticulaires, la lumière émise par le bec.
« cet optique est mobile en envoie ainsi, sur un point quelconque de l’horizon, trois éclats blancs successifs qui se reproduisent régulièrement après un intervalle obscur. La rotation su système est obtenu au moyen d’un moteur électromagnétique alimenté par quatre piles à oxyde de cuivre, pouvant fonctionner trois mois environ sans rechargement des piles ni changement des zincs. La rotation complète s’effectue en dix ou douze secondes : c’est une vitesse relativement considérable, étant donnée la faiblesse du courant électrique qui alimente le moteur. Pour l’obtenir, on a dû monter l’optique sur un flotteur à gorge plongeant dans une cuve qui contient du mercure. Ce flotteur est guidé par l’arbre vertical sur lequel est placé l’induit. La gorge du flotteur forme raccord pour la communication d’huile entre le réservoir fixe et le bec, mobile ainsi que l’appareil. L’huile est maintenue dans le bec à un niveau constant au moyen d’une disposition très ingénieuse : du grand réservoir supérieur, qui contient l’approvisionnement d’huile, descend un tuyau terminée par une canule. Cette canule plonge dans un flotteur lesté au mercure. le flotteur lui-même est contenu dans un petit réservoir, communiquant, comme vous venez de le voir, avec le bec. Lorsque l’huile baisse dans le bec, par suite de la consommation, elle baisse en même temps dans le petit réservoir ; le flotteur descend et la canule se dégage du mercure. Il s’écoule alors une petite quantité d’huile qui élevant le niveau dans le réservoir, fait remonter le flotteur. La canule, plongeant de nouveau dans le mercure se trouve ainsi obstruée et l’écoulement est interrompu ».
Nous avons pensé que ces détails, malgré leur côté tout technique, intéresseraient nos lecteurs et qu’ils voudraient bien passer sur la sécheresse de l’exposé en raison de l’importance et de l’originalité du nouvel appareil d’éclairage installé sur la Horaine. La construction de cet appareil et de la tour qui le supporte fait le plus grand honneur à notre corps d’ingénieurs, et particulièrement à M. Thiébaut, ingénieur en chef des Côtes-du-nord. Combien d’existences auraient été sauvées si la flamme protectrice qui veille maintenant sur la Horaine avait signalé plus tôt la présence de ce redoutable écueil, dont le nom même a je ne sais quelle résonace funèbre !
Charles le Goffic
Le Monde illustré du 18 décembre 1897
Commentaires :
Le système d’éclairage automatique ne sera pas fiable, et le feu est souvent éteint, son ré-allumage nécessite une intervention manuelle avec un débarquement sur la tourelle ce qui n’est pas assuré.
Le système d’éclairage sera modifié en 1927 par un feu à acétylène puis en 1936 par un feu à propane elle fonctionne actuellement à l’électricité alimenté par des panneaux solaire.