Vers 1900, 1910, on identifie sur les cartes postales de Portieux un beau sloup pilote le « Grand Léjon »BI P1, une bisquine goélette la «Lucie-Marie »BI 108 et à Dahouet le cotre pilote l’« Écume » ou la chaloupe la « Pauline » SB737 de 1901 à 1910
Le cotre pilote le « Le grand Léjon » a été construit a été construit vers 1900 à Paimpol pour le pilote François Floury, suivant un autre Grand Léjon au même pilote, son fils également nommé François Floury prendra la suite de son père au pilotage et la pêche jusqu’en 1938 ou il sera vendu à Monsieur Barreau qui le motorisa et l’arma à la pêche à la langouste au Maroc ou il fera naufrage en 1935.
Règlement sur le service du pilotage dans le deuxième arrondissement maritime, institué par décret du 25 avril 1857 signé par Napoléon III
Stations du Portrieux, du Légué et de Dahouet
Cette station collective est limitée, vers le nord-ouest, par une ligne passant par la pyramide située sur la pointe de Minard, vue par le clocher de Plounez, et, vers le nord-est, par une ligne allant du cap d’Erquy au Grand-Léjon . […]
Les pilotes de chacune des stations de Portrieux et du Légué doivent avoir deux chaloupes ou embarcations en bon état. Une de ces chaloupes, au moins, sera toujours dehors. Le pilote de Dahouet est tenu d’avoir une chaloupe ou embarcation avec laquelle il devra être dehors aussi souvent que possible.
Les pilotes de ces stations sont chargés indistinctement du pilotage des navires à la sortie des rades comprises en dedans des limites ci-dessus.
Pour la sortie des ports, le pilotage appartient de droit aux pilotes du port de sortie.
Pour le départ des rades, le pilotage appartient au pilote qui se rend le premier à l’appel fait par bâtiment. Le pilotage d’entrée et de sortie de Binic est fait par les pilotes de Portrieux.
Ces pilotes sont aussi indistinctement chargée du pilotage d’entrée dans les ports et rades de leur station collective. Ils ne se démontent point entre eux. Néanmoins, lorsqu’un navire en destination du Légué aura passé plus de vingt-quatre heures sur la rade des îles Saint-Quay, ou au mouillage sous la tour, les pilotes du Légué sont privilégiés pour le conduire dans ce port, pourvu qu’ils se présentent à bord pendant la première heure de flot de la marée avec laquelle le navire doit entrer.
Les pilotes de Portrieux, du Légué et de Dahouet ont, en outre, indistinctement, le droit de piloter par le chenal de Bréhat, jusqu’en dehors des dangers, les navires qu’ils sortent de la baie, et réciproquement les navires qu’ils prennent à la mer.
Les pilotes de ces stations ont aussi le droit, dans le cas ci-dessus, de pilote les navires qu’ils entrent ou qu’ils sortent, jusque sur les rades de l’anse de Paimpol, de Bréhat et de Mélus.
Ils ne sont démontés par les pilotes de Paimpol, Port-Even, Bréhat et Loguivy, que si le navire qu’ils conduisent, soit à la sortie, soit à l’entrée des ports de la baie de Saint-Brieuc, est contraint de mouiller sur l’une des rades ci-dessus.
Ils ont, en outre, le droit de démonter le pilote de Paimpol, de port-Even, de Bréhat ou de Loguivy, qui peut se trouver à bord d’un navire faisant route vers l’un des ports de la baie de Saint-Brieuc, et qui aurait été contraint de mouiller sur l’une des rades de Paimpol, de Bréhat ou le Mélus.
Les pilotes de ces stations doivent être reçus par les navires se rendant dans l’un des ports de le baie de Saint-Brieuc, partout, où ils les abordent.
Le pilotage en dehors de la Horaine se paye le même prix que celui fait par le chenal de Bréhat.
Le pilotage de la rivière du Légué, est obligatoire pour les navires astreints à l’obligation de prendre un pilote. Le pilotage pour la sortie de cette rivière est exclusivement réservé aux pilotes du Légué.
Tout navire allant d’un port à un autre port de la baie doit, dans tous les cas, le pilotage d’entrée et celui de sortie.
Les pilotes de Paimpol, Port-Even , Bréhat et Loguivy, continuent à pilote les navires en destination de la baie de Saint-Brieuc qu’ils ont pris à la mer, jusque sur la rade des îles Saint-Quay, ou dans le port de destination, s’ils ne sont pas démontés par l’un des pilotes de la baie :
Mais les pilotes de Paimpol, etc. , doivent avoir soin, sous peine de perdre leur salaire au profil des pilotes du point de destination du navire, de faire tenir battant le signal d’appel d’un pilote, jusqu’à ce que le navire ait atteint l’une des directions ci-dessus, selon le lieu vers lequel il tend.
Les pilotes de Portrieux, Légué et Dahouet doivent avoir le même soin, sous les mêmes conditions, quant un pavillon d’appel d’un pilote, lorsqu’ils sont à bord d’un navire qu’ils sortent de l’un des ports de la baie de Saint-Brieuc, à destination de l’une des rades ou ports des stations de Paimpol, Port-Even, Bréhat et Loguivy, jusqu’à ce qu’ils aient atteint la direction du clocher de Plouézec, par le Mez de Goélo ; mais , dès qu’ils ont dépassé la direction vers l’ouest, ils peuvent continuer le pilotage sans craindre d’être démontés ; ils sont
Alors traités absolument de la même manière que les pilotes du quartier de Paimpol.
Lorsqu’un pilote de la baie de Saint-Brieuc, soit à l’entrée, soit à la sortie, sera contraint d’aller chercher un refuge dans l’une des rades des environs de Paimpol ou de Bréhat, il recevra les prix fixés par le tarif de pilotage du quartier de Paimpol.
Commentaires :
Suivant le décret de 1857, les effectifs sont les suivants 3 pilotes à Portrieux, 2 pilotes au Légué et 1 pilote à Dahouet
Suivant le décret de 1838, le nombre de pilotes au Légué était plus nombreux :
2 pilotes à Portrieux, 4 au Légué, et 1 à Dahouet.
Ce décret de 1838 spécifie : « Lors du départ annuel des navires pour la pêche de la morue, les capitaines auront la faculté, en raison de l’insuffisance du nombre des pilotes brevetés, mais après que ceux-ci se trouverons tous employés, de prendre des marins pratiques pour mettre leurs bâtiments dehors. »
On note les pilotes suivants à la station de Portrieux
DENIS Jean-François, né en 1777 à Étables, pilote de 1831-1839
LUCAS Jean-François né en 1781 à Saint-Quay pilote de 1832-1840
CORNALY François né en 1801 à Ploubazlanec pilote de 1840-1854
FLOURY Sylvestre né en 1815 à Ploubazlanec pilote de 1840-1866
FLOURY François-Marie né en 1822 à Ploubazlanec pilote de 1854-1865
LE GALL Mathieu né en 1797 à Ploubazlanec pilote de 1847-1862
CORNALY Jean-Marie né en 1833 à Ploubazlanec, pilote de 1858-1862
LE GALL Jean-Marie né en 1829 à Ploubazlanec, pilote de 1862-1865
LE GALL Vincent, pilote en 1883
FLOURY François-Marie, pilote en 1889
CORNALY François-Marie né en 1864 à Saint-Quay, pilote en 1889.
Les familles Floury, Le Gall et Cornaly originaire de Ploubazlanec sont bien représentées
La mission des pilotes de Portrieux comprenait également la relève des gardiens et le ravitaillement des phares du Grand Léjon et des Iles St Quay.
Caractéristiques :
Longueur totale : 14,38 m
Longueur à la flottaison : 12,20 m
Largeur max. hors bordé : 4,32 m
Tirant d’eau : 2,55 m
Maitre-couple immergé : 4,16 m2
Déplacement : 33,75 t
Surface de voilure : 155,20 m2
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Position de la roche blanche :
3° 59’ 00’’ W
48° 58’ 30’’ N
13,5 milles dans le 8° du phare de l’île de Batz
18,8 milles dans le 296° du phare des Triagoz
Longueur 0,75 mille, largeur 0,5 milles profondeur 7 à 9 mètres
Sur la carte 970 du dépôt des cartes et plans de la marine «de l’île de Bas à l’île Bréhat » de 1900 la roche blanche est bien présente, cette carte à été régulièrement mise à jour par son propriétaire, entre 1917 et 1930, la roche blanche a été supprimé de la carte sur une des corrections publiées à cette époque.
Sur la carte actuelle de la manche ouest SHOM 7311, aucune roche, aucun haut fond n’apparait. La Manche, à cet endroit présente un fond plat à une profondeur de 80 m. Je me demande quel phénomène , par gros temps, a put semer le doute dans l’esprit de générations de marins sur la présence d’une roche.
Certainement que par certaines conditions de mer et de courant de marée, la mer déferle comme si il y avait une roche, je serai curieux d’avoir le témoignage actuel de pêcheurs fréquentant ces parages ou d’officiers des car ferry de Roscoff passants tous les jours sur cette position sur la route Roscoff Plymouth.
Dans les instructions nautiques anciennes :
1767
« Le petit flambeau de mer » Christophe-Paul de Robien 1731
Roche Blanche
Au nord et nord quart Nord-Est de l’île de Bas 5 lieues, il y aune roche sous l’eau nommé Roche Blanche : les livres Hollandois disent que de basse mer le sommet d’icelle parait à fleur d’eau, mais les pêcheurs de l’île de Bas m’ont dit le contraire, et qu’il y a toujours de l’eau pour y passer toutes sortes de grands navires par-dessus, bien que de mauvais temps la mer y rompt beaucoup plus fort qu’aux autres endroits : cette Roche est distante de Casquet 27 lieues au Nord-est quart est, et des sept Iles 9 lieues à l’Est Sud Est : je dis que les Sept Iles sont 9 lieues à l’est Sud Est : je dis que les sept Iles sont 9 lieues à l’Est Sud Est, et casquet 27 lieues au Nord-Est quart d’Est d’icelle.
1851
« Renseignements nautiques sur les côtes de France, d’Angleterre, d’Écosse, d’Irlande, de Belgique, de Hollande, du Jutland, du Danemark, de Prusse, de Suède, de Norvège, de Laponie, de Russie, d’Espagne et de Portugal » par C.B. Matenas ancien capitaine au long-cours Page 890
Roche Blanche –Cette roche, qui est sous l’eau, est située à 14 milles au N.-E. 8° N vrai, de l’île de bas, et à 19 milles au N.-O. des Sept Iles. Les uns prétendent que son sommet découvre à base mer ; d’autres, au contraire, affirment qu’elle n’est pas dangereuse, bien que la mer brise à cet endroit avec plus de force qu’aux points circonvoisins, et qu’il n’y ait pas assez d’eau sur son sommet pour un vaisseau. M. Deschamps dit qu’elle est à 18 milles au N. ou N. 1/4N.-E de l’île de Bas ; qu’elle est toujours couverte, mais que lors des tempêtes, la mer brise dessus avec violence à marée basse, et que le bouillonnement, produit par la violence des lames reste quelque temps en vue. Cependant cet observateur assigne une profondeur de 53 brasses à cette roche sur un fond de sable et gravier ; de ce point, l’île de Bas peut être vue du pont d’un navire.
Nous avons consulté les cartes à grands points du Pilote français, sous les numéros 970 et 971, et nous n’avons pas trouvé ce danger indiqué. Sur la carte de la manche, publié par Robiquet, nous le voyons signalé comme douteux, bien que cette carte n’indique que 9 mètres d’eau à ce point. Nous avons aussi consulté les cartes anglaise à grands points, l’une publié en 1841, et l’autre en 1848 toutes deux indiquent cet écueil aux rumbs de vent et distances relatés ci-dessus ; dès lors, nous engageons les navigateurs à s’assurer par eux-mêmes, autant que possible, de son existence, bien qu’il soit loin de notre pensée de vouloir les mettre en défiance contre les travaux de notre habile ingénieur hydrographe, M. Beautemps-Beaupré
ILE DE SIEC
L’Île de Siec était autrefois le rendez-vous des pêcheurs de sardines. Cette pêche avait commencé en 1864, et en 1870 il y est venu 57 bateaux de Douarnenez. Il y avait sur l’île une fabrique de sardines aujourd’hui abandonnée. Le port de Siec est formé par un môle qui a environ 80 m de longueur ; le fond, à l’extrémité de ce môle, est de 2m50 au bout de la cale à l’intérieur de la jetée. L’alignement pour entrer dans le port est donné par la maison Deschamps ouverte à droite du bout de la jetée, on contourne la jetée à 50 m et on est dans le port.
Pour atteindre le port de Siec, on vient de l’O. ou du N. Si l’on vient de l’O. : suivre le clocher de Kreisker de sa hauteur à droite de la tourelle Ar Skeul (la seule qui existe dans l’anse), puis prendre la maison Deschamps à droite du bout de la jetée pour entrer au port. Si l’on vient du N. ou du N.O., il faut suivre : le clocher de Cleder par le rocher blanchi Teven Bras qui se trouve sur la terre dans l’E. de Portz Nevez ; ou bien, le clocher de Sibiril par Roc’h Forhic ; l’un ou l’autre de ces alignements conduit prendre la maison Deschamps à droite de la jetée pour entrer à Siec.
Aux environs de l’île de Siec, il y a plusieurs basses autour desquelles on fait des pêches fructueuses. Nous citerons seulement les principales, en partant de l’O. : Qeyn Cos, est un plateau de roches courant N.O. et S.E., sa tête N. est de 7m80 et a pour marques : le clocher de Plouneour très à gauche de Gaouloc de la grosseur de la roche et celui de Plounevez à droite de Penven Kernic ; les têtes du milieu sont de 5m50, et la plus S., est couverte de 6m50. On y pêche beaucoup de homards, des lieux et des vieilles. Les plateaux de Trebejou (0m60) et les Leac’h sont aussi renommés pour les homards. Les basses de Roc’h Haro, 5m80 ; de Sibiril, 2m90 ; et celles qui entourent Mean Nevez et Brouillerezou fournissent beaucoup de crustacés, des lieux, des vieilles et des congres.
ILE DE BATZ
L’île de Batz est un point très important pour la navigation parce que les petits bateaux y trouvent un bon abri. Les parages de l’île sont dangereux à cause des courants qu’on y rencontre et des dangers qui l’entourent ; les petits bateaux échouent dans le port en toute sécurité. On peut approcher l’île de Batz à 1 mille dans le N., et à la même distance dans l’O. et dans l’E. quand la mer est belle ; mais lorsqu’il y a de la houle, il faut donner 3 milles de tour à l’île. Il faut bien se méfier du courant de jusant qui dure de l’heure du plein à celle de la basse mer à terre, et porte en grand sur la côte de Plouescat et sur la pointe de Pontusval ; beaucoup de bateaux se sont jetés à la côte pour n’avoir pas fait attention à cela.
Le port de l’île de Batz se compose de l’échouage de Portz Kernoc’h qui découvre de 2m50 et qui est tout à fait à l’abri de la mer ; il se trouve au S. de l’île et au milieu du canal. Il y a à l’entrée du port un très bon mouillage où les bateaux restent toujours à flot : ils sont à proximité de Roscoff. Les hommes de l’île de Batz se livrent à la pêche qui leur rapporte beaucoup depuis qu’ils peuvent expédier leur poisson à Paris par le chemin de fer de Roscoff. La pêche des homards et langoustes se fait toute l’année, l’été principalement. Celle des lieux, des raies et des congres se fait au moyen de cordes d’un kilomètre, garnies d’hameçons et étendues sur le fond pendant les 4 dernières heures de jusant.
Les bateaux des rivières de Penzé et de Morlaix viennent prendre du sable sur la grève qui est à l’E. de l’île de Batz. Ils viennent aussi y prendre beaucoup de goémon et leur équipage vivent, à l’aise, de ces produits.
ROSCOFF
Roscoff étant tête de ligne du chemin de fer est précieux pour les pêcheurs, aussi, nous allons dire toutes les passes qui y conduisent.
CANAL A TERRE DE L’ILE DE BATZ - Le canal qui est entre l’île de Batz et la terre, peut être fréquenté, en morte-eau, par tous les bateaux de pêche; le plus petit fond, sur lequel on est forcé de passer, est de 0m au N. de Perroc’h et de 0m50 au sud.
Pour donner dans le canal en venant de l’O., il faut tenir la chapelle ou la pyramide Sainte Barbe par la tache blanche du rocher le Loup. Cette direction conduit jusque par le travers de la roche l’Oignon, balise rouge. Dès qu’on en est au N.N.E., venir sur bâbord et gouverner à mi-chenal à l’E.S.E. environ pour passer entre l’Oignon et la roche la Croix, balise noire qui se trouve sur la côte S. de l’île, d’où il faut gouverner sur la tourelle Perroc’h pour la laisser au N. ou au S. ; si on passe au N., on devra suivre la première petite maison qui est à gauche du moulin ouest de l’île de Batz vue par la pyramide blanche de Kernoc’h qui est dans le milieu du port de l’île de Batz ; pour passer au sud de Perroc’h il faut suivre exactement la tache rouge qui est sur le côté droit de l’île Pighet vue à toucher à gauche la tourelle Duslen, puis on suit : la tourelle blanche et noire de Men Guen Bras vue par la balise de Roc’h-Zu pour parer la roche qui déborde au sud la tourelle Duslen ; quand le clocher de Roscoff passe à gauche de la tête E. des Bourguinonnou cette roche est parée et on doit venir sur bâbord pour prendre, par l’arrière, la tourelle noire de Perroc’h par celle de Duslen, direction qui conduit en dehors du canal.
Les passes de Roscoff se prennent toutes du canal de l’île de Batz, excepté celle de l’E. Elles sont toutes praticables quand il y a de l’eau pour entrer au port de Roscoff.
PASSE DE L’E. - Se fait avec l’alignement du clocher de Roscoff par la tourelle Rannic (tourelle noire qui se trouve au N.O. de la pointe Bloscon) ; on laisse à bâbord la bouée noire de la basse Bloscon, et à tribord la tourelle blanche et noire de Men Guen Bras. Quand on arrive auprès de la tourelle Rannic on doit la laisser à 15 m par bâbord, puis on gouverne sur le bout de la jetée de Roscoff en ayant soin de ne pas passer trop près de l’extrémité de la cale de Pen ar Vil ; la tourelle Men Guen Bras par celle de Rannic fait parer l’extrémité de cette cale.
GRAND CHENAL - En venant du large on suit, pour entrer dans le canal: la tourelle noire de Perroc’h par la tourelle rouge de Duslen, puis l’alignement des feux de Roscoff qui conduit jusqu’au bout de la jetée. Le feu supérieur, mal reconnaissable, se trouve au fond du port, adossé au pignon de la maison Bernard qui est blanchie ; le feu inférieur est sur une potence à l’extrémité de la jetée.
PASSE DU CENTRE - Elle se prend de l’E. de la tourelle Duslen ; elle laisse à tribord Carrec-ar-Guin et Carrec-ar-Sucre et à bâbord Benven Bras et la balise de la Vache qui est rouge. L’alignement est donné par une maison grise à pigeonnier vue touchant le bout de la jetée de Roscoff.
PASSE DE L’O. - Elle se prend du milieu du canal ou de l’entrée du port de l’île de Batz. On laisse par tribord la balise rouge de Ar-Poloss-Treas, la balise rouge de Carrec-ar-Vas et les murs de Roscoff ; par bâbord on laisse la tourelle noire de Perroc’h, l’île Verte, la balise noire de Notre Dame ou Karrec Aotrou Maria, la roche Sainte Union (7m50) et enfin la balise de la Vache. L’alignement à suivre dans ce chenal est donné par : la tache blanche de la maison Keraoulouen ou Guillou Turc vue par la tourelle blanche de Poullouz.
MOUILLAGES DANS LE CANAL - On mouille à l’entrée du port de l’île de Batz en face de l’anse de la Rue, en tenant la tourelle Perroc’h par celle de Duslen et le sémaphore de Bloscon par Rolea ou petit Loup ; il y reste 2 m (fond de S. et H.) A l’E. de la tourelle Duslen on mouille par 3 m avec la tourelle Perroc’h par celle de Duslen et le sémaphore de Bloscon par Benven Bras.
Prés de la pointe Bloscon, on mouille sur l’alignement du clocher de Roscoff par la tourelle du Rannic et par le travers de la pointe ; il reste toujours en cet endroit 2m50 d’eau (fond de S. et R.).
PORT DE ROSCOFF - Le port de Roscoff est formé par une jetée de 300 m de longueur. Le bout de cette jetée est peint en noir et le fond de vase, dans le port, est élevé de 3m90 au premier escalier en dedans de la jetée ; il s’en suit qu’on ne peut pas toujours accoster le quai ; on a construit dans l’E. du port dans l’anse de Trezen, une cale sur les roches de Pen ar Vil ; le fond au pied de cette cale est de 1m60 ; les bateaux de pêche peuvent y accoster à toute heure de marée dans les mortes-eaux.
Quand il n’y a pas d’eau pour accoster au port de Roscoff ni à la jetée de Pen ar Vil, les bateaux débarquent leur poisson à des cales construites sur les roches au N.O. de la ville et dans l’anse de Laber. La cale la plus basse est construite sur la partie N.E. du rocher Rolea ou petit Loup ; le fond au pied est de 0m40. Sur la roche Gaurec il y a deux autres cales qui permettent de communiquer avec Roscoff.
Les bateaux de pêche préfèrent quelquefois rester sur leurs béquilles dans l’anse de Laber que de rentrer dans le port de Roscoff. Pour s’y rendre, il faut suivre en venant de l’O., le clocher de Roscoff à mi-distance entre le Loup qui est blanchi et la roche pointue Dannic qui termine au N. la pointe Lédanet ; on passe ensuite à mi-distance entre ces deux roches puis on contourne la pointe Perkiridic à 100 m dans l’E. et on se trouve à l’échouage de Laber sur des fonds de vase dure asséchant de 3m20.
ROCHES INDIQUANT LA HAUTEUR D’EAU DANS LE PORT DE ROSCOFF.
Quand on vient de l’O. on rencontre la balise de la Croix et celle de l’Oignon ; la première roche, à fleur d’eau, indique 1 m d’eau au bout de la jetée de Roscoff ; la roche l’Oignon, à fleur d’eau, indique 3 m au même endroit. Si on vient de l’Est, l’indication est donnée par la roche Men Guen Bras sur laquelle il y a une tourelle noire et blanche ; la roche, à fleur d’eau, indique qu’il y a 1 m d’eau au bout de la jetée de Roscoff.
Commentaires
Ces instructions nautiques publiées dans l’almanach du Marin Breton de 1905 s’adressent principalement au pêcheurs des ports extérieurs aux environs qui seront appelés à naviguer dans les parages de Roscoff et de l’île de Batz . Elles permettent aux pêcheurs d’avoir accès aux instruction nautique pour un prix modique. Des données pratiques et économiques, particulièrement intéressantes sont ajoutées aux instructions « officielles » de navigation.
Actuellement, la passe ouest de Roscoff n’est presque plus pratiquée de par la présence de l’estacade.
Ces instructions évoquent les cales sur les rocher Rolea et Gaurec à l’entrée de la baie de l’aber, ces cales de basse mer sont principalement utilisées pour le passage de l’île de Batz à basse mer, j’y reviendrai à travers d’autres articles sur le passage entre Roscoff et l’île de Batz.
Sources :
Almanach du marin Breton 1905
Les instructions complètes de l’île de Batz à Port Blanc de Almanach du marin Breton 1905:
http://www.marinbreton.com/medias/4/24/1296812259.pdf
Nous allons découvrir dans cet article très vivant, écrit par Charles Beunet dans les colonnes de Ouest éclair en 1931, la vie quotidienne des pilotes de la station de Saint-Malo-Saint-Servan, pour ceux qui souhaite approfondir l’histoire des pilotes de cette station, je vous recommande la lecture livre de Jean-Luc Blaise et Jean le Bot « pilotes et pilotages en baie de Saint-Malo au temps de la voile » édité en 2010 aux éditions Cristel.
Huit jours avec les pilotes de St-Malo St-Servan
« le pilotage consiste dans l’assistance donnée aux capitaines par un personnel commissionné par l’État pour la conduite des navires à l’entrée et à la sortie des ports rades et eaux maritimes des fleuves et des canaux »
(Obligation du Pilotage ; article 1er de la loi du 28 mars 1928 sur le régime du pilotage dans les eaux maritimes)
I.
Comment sur les côtes de France, les navires sont-ils protégés contre les récifs qui se dressent à l’entrée de tous les ports ? On comprendra aisément qu’un capitaine de navire, quelles que puissent être ses capacités, ne peut connaitre les mille et un cailloux qui bordent les côtes et sont autant de dangers pour les navires. Il faut donc que ce capitaine soit assuré de trouver à l’entrée de chaque port une organisation capable de lui rendre utilement service.
C’est la raison même du service de pilotage. Toujours à la mer, en toutes époques et par tous les temps, les pilotes forment un corps d’élite dont on connait trop peu la vie, toute de dévouement et d’abnégation.
Le grand public, qui ignore ces gens braves et ces braves gens, devait connaitre leur dure existence. C’est ce que nous allons essayer de lui apprendre dans les lignes qui vont suivre.
Pourquoi nous avons choisi la station de Saint-Malo-Saint-Servan ?
Situé par 48°41’5’’ de latitude nord et 2°7’4’’ de longitude ouest, le port de Saint-Malo-Saint-Servan avec son trafic annuel d’un million de tonnes, est le seul port de la Manche où les pilotes sont tenus de faire du « service de mer » et obligés de croiser à plus de 10 milles du port ; sur toute l’étendue de nos côtes, trois autres ports seulement sont d’ailleurs dans ce cas : Dunkerque, Saint-Nazaire et Bordeaux. Le rôle des pilotes de Saint-Malo est d’autant plus considérable que l’amplitude des marée y est très élevée : la différence entre les plus hautes et les plus basses mers étant de 13m.66 , circonstance qui oblige les hommes de la station à une connaissance parfaite de la baie et à une grande expérience professionnelle.
Les pilotes et leur matériel.
Douze pilotes forment l’effectif de la station. Ce sont : Mathurin Lucienne, Pierre Evrart, Célestin Guéras, Etienne-Hippolyte Puisné, Henri Thiriou, Georges Paris, François Foutel et Charles Magon. Groupés en syndicat dont le président est M. Guéras et dont MM Fromont, Thiriou et Paris sont vice président, secrétaire et trésorier. Les pilotes ont à leur tête un pilote-major, M Alfred jean, un capitaine au long cours ayant fait ses preuves et qui dirige la station avec une compétence et un savoir faire reconnu de tous.
La station est propriétaire de son matériel. C'est-à-dire des deux cotres assurant le service de mer : le Général Gallieni et l’Alouette, de la vedette Union, réservé au service de terre et des canots servant aux manœuvres d’accostage.
Des deux cotres de mer, le Général Gallieni est à vrai dire , le seul utile, puisqu’il navigue 49 semaines sur 52. L’alouette faisant uniquement les remplacement ; construit à Fécamp pour les pilote de Dieppe, il fut cédé en 1921 à Saint-Malo : d’une longueur de 17 mètres et de 27 tonneaux de jauge, il est muni d’un moteur de 45 chevaux qui par temps calme, vient fort heureusement en aide à la voilure.
La vedette Union de construction récente assure grâce à un puissant Diesel une liaison rapide du port au large pour les navires sortants.
Divisés en trois « bordées » de quatre, les douze pilotes de la station assurent une semaine le service de mer, une semaine le service de veille et une semaine le service de terre.
Le premier consiste à croiser au large dans l’attente des navires ; la « bordée » assurant le second est de garde au Môle des Noires, à l’entrée du port, et rentre les bâtiments amenés du large sur rade ; enfin le troisième service est le plus tranquille, les pilotes de cette bordée sortant les navires des bassins pour les conduire hors des passes et rentrant au port avec l’Union.
Vers le large
Les pilotes de la station, auxquels nous avions exprimé le désir de passer quelques jours à bord du Gallieni s’étaient fort aimablement prêtés à la requête de l’Ouest-Éclair et c’est ainsi que par un après midi ensoleillé, nous levâmes l’ancre de la cale Solidor pour une semaine de mer ?
La bordée de mer comprenait les pilotes Guéras, Fromont, Puisné et Paris. Jean Legal marin-né, qui prépare l’examen de pilotage, et « p’tit Louis » ancien pêcheur de Terre-Neuve complétaient l’équipage. Une bonne brise d’ouest-sud-ouest vint fort à propos favoriser la marche du Galliéni vers le large. Les Beys, le fort Harbourg, l’île de Cézembre le phare du Jardin sont vite dépassés et le cotre couché par le vent, s’éloigne rapidement de la cité corsaire dont les remparts commencent à s’estomper. Célestin Guéras est à la barre, et par l’étroite écoutille, nous descendons dans la chambre centrale s’organiser pour passer le plus confortablement cette semaine de mer. Une des six couchettes bordant la chambre m’a été soigneusement préparée et je palpe avec plaisir les épaisses couvertures qui la garnissent ; sous chaque couchette se trouve un tiroir où chacun dispose ses vêtements et provisions.
La coque du navire comprend, outre cette chambre centrale, le poste avant où est logée la cuisine, la chambre du moteur et le « cul de brigault ». de la cuisine monte pour l’instant une agréable odeur de saucisse aux choux que nous attaquerons tout à l’heure, mis en appétit par l’excellent apéritif du grand large.
Remontons sur le pont humer cet apéritif ; nous sommes en pleine mer et avons dépassé les riantes plages et anses de Saint-Cast de la Fresnay, des Sévignés ; à quelques milles à tribord, voici le cap Fréhel dont le phare majestueux signalera cette nuit aux navigateurs l’approche de la côte ; au loin, l’orgueilleuse flèche du clocher malouin s’est elle-même confondue avec l’horizon.
C’est la grande solitude du large sur les flots à peine agités par une légère houle. Le Gallieni vogue à près de douze milles de Saint-Malo ; il est à son poste, son équipage prêt-à-porter aide et assistance au navire qu’il conduira à bon port à travers les dangereux écueils de la baie.
II.
Une fumée au nord !
« Une fumée au nord ! » a crié l’homme de quart, et tous les regards de scruter l’horizon.
Le pilote Puisné a gravi l’échelle de corde qui grimpe au mât et confirme le vapeur qui vient du large ; le moteur du Gallieni est mis en marche et nous cinglons vers le nord. Imprécise d’abord, la fumée se détache maintenant et bientôt le navire se rapproche. « dans une heure nous serons à côté » dit Célestin Guéras. Il ne s’est point trompé et, au moment prévu, le vapeur est à quelques centaines de mètres du cotre, il a arboré le pavillon aux rectangles bleu blanc et rouge, demandant ainsi un pilote de monter à son bord. C’est un cargo charbonnier anglais de 900 tonneaux, le Dorothy-Rose, un habitué du port de Saint-Malo fréquentant la ligne régulière de Cardiff.
Il faut alors effectuer la manœuvre la plus difficile et la plus dangereuse du pilotage
La mise à bord
Elle est, en la circonstance, grandement facilitée apr le beau temps. C’est le pilote Ange Fromont qui l’accomplira et conduira à Saint-Malo le cargo anglais. Il embarque dans le canot du bord, frêle esquif qui, malgré le peu de houle, est balloté telle une coquille de noix. Legal godille énergiquement vers le Dorothy Rose et, à quelque mètres, Fromont lance la traditionnelle question posée à tous les navires accostés : « Where are you going ?» (Ou êtes vous allant ?). Le canot s’est approché du bord et le « père Ange », malgré ses soixante ans, a fort lestement saisi l’échelle de corde qui pend au bordage et s’est hissé sur le pont du vapeur, il gravit la coupée et d’un vigoureux shakehand souhaite la bienvenue au capitaine anglais.
Cependant que Legal a regagné le Gallieni, le Dorothy Rose reprend de la vitesse et sous la conduite du pilote, se dirige vers Saint-Malo. « il prendra, me dit Georges Paris, le grand chenal et l’alignement de Rochebone par le phare du Jardin pour tenter ensuite de rentrer au port » Pour tenter, nous a déclaré le pilote, car le navire anglais a forcé la marche et est en avance sur, pour prendre un terme sportif, l’horaire de la course.
Ange Fromont passera donc la nuit à terre. Tout L’équipage du Gallieni et son passager, votre serviteur, suivent longtemps des yeux le cargo qui ce soir, sera amarré aux docks du bassin de Saint-Servan.
« partir, c’est mourir un peu » la phrase célèbre est toujours vraie… et notre pensée à tous accompagne le navire vers la terre.
Les abords de Saint-Malo
« Vous prendrez le premier chemin à main gauche, vous verrez un calvaire, obliquez à gauche et après deux cents mètres, franchissez la barrière : un quart d’heure de marche et vous serez à la ferme » Ainsi vous indique-t-on à la campagne le chemin à suivre pour vous rendre au lieu que vous cherchez. Supposez que le port de Saint6Malo soit une ferme et que pour vous y rendre, l’on vous indique ainsi sept ou huit chemins différents !
Un navire peut entrer au port de Saint-Malo par :
Les second et troisième chenaux sont les plus usités et les navires d’une moyenne de 400 tonneaux qui fréquentent Saint-Malo et saint-Servan sont guidés par ces passages.
Pourquoi le Dorothy-Rose était en avance sur l’horaire ?
J’ai dit plus haut que le cargo anglais Dorothy-Rose avait forcé la marche ; son cas peut être pris pour type, il représente la moyenne des bâtiments qui ne peuvent, en morte-eau, entrer au port. Vingt-quatre heures plus tard, et le frêt de 900 tonneaux que représente le navire restait inutilement pendant cinq ou six jours sur la rade. L’on comprend que les Compagnies de navigation aient intérêt à choisir leurs capitaine […]
Le pilotage , il y a quelques années
En exergue de mon exposé d’hier, j’ai cité un paragraphe de la loi qui, sous la signature d’André Tardieu, alors ministre des Travaux Publics, régit le pilotage. Cette loi de 1928 amis fin à bien des querelles intestines entre la grande famille des pilotes. Si en ce qui concerne la station de Saint-Malo, elle n’a fait que confirmer une situation établie , cette situation établie cette situation n’existait cependant que depuis 1921 ; c’est ce qu’ont bien voulu m’expliquer les pilotes du Gallieni. Ce n’est en effet , que depuis dix ans que la station de Saint-Malo-Saint-Servan possède le quasi monopole de la rentrée et de la sortie des navires. Nous ne tiendrons pas compte, en occurrence, des pilotes-pêcheurs de Cancale qui tout en pratiquant le pilotage en dilettantes, ont cependant une conscience entière du rôle qu’ils assument. Or donc, depuis l’ordonnance napoléonienne de 1806 et jusqu’à 1921, les navires touchant Saint-Malo avaient à leur disposition deux stations de pilotage : Saint-Malo et Saint-Cast « C’était , me dit Célestin Guéras qui vécut cette époque, une lutte comme au temps des corsaires : les pilotes couraient sur un navire tel Surcouf sur un brick hollandais. En dépit de cette concurrence, les navigateurs n’étaient pas mieux servis et il ne passait pas de mois sans que l’administrateur de la Marine ne fut saisi de plaintes émanant des capitaines. On le comprendra facilement quand l’on saura que les bateaux pilotes s’avançaient jusqu’à 25 et 30 milles du port. S’ils se trouvaient à l’ouest, le navire venant du nord passant inaperçu !
Fort sagement, la Fédération Nationale des pilotes de France a mis fin à cet état de choses en groupant les stations. Cette solution répondait d’ailleurs entièrement au triple point de vue de la fédération :
Cet exposé de mes aimables hôtes nous avait conduit fort avant dans la soirée et, sans nous en apercevoir, les heures fuyaient sous l’œil tranquille du patron du cotre : le général Gallieni, représenté à l’affut d’un canon par un vieux chromo fixé au mât.
Sur le pont, Jean Legal à la barre veillait. Le vent du large nous saisit quand nous y remontons et bientôt chacun regagne sa couchette où soigneusement enfermé, il goûtera un repos bien gagné, sous la sauvegarde d’un des matelots de quart entre les mains duquel reposent, en même temps que notre sort, la vie et la sécurité des navigateurs qui toucheront par cette froide nuit d’hiver la côte de France
III.
A l’horizon rien de nouveau
Sept heures « P’tit Louis », le matelot de quart a fait le branle-bas, son rude poing a heurté les volets de ma couchette.
La nuit a été calme et le sommeil réparateur n’a pas été troublé par le roulis. Chacun est frais et dispos et l’on fait en commun les ablutions matinales. Et à l’horizon, pas un nuage ne voile l’azur du ciel. C’est la morte-eau et la marée baise ; d’ici quelques heures, l’arrivée d’un navire est peu probable. Nous allons en profiter pour nous rabattre dans la baie de la Frenay tendre des filets et tenter ainsi d’améliorer l’ordinaire.
Pendant que les pilotes Puisné et Paris se livrent à cette opération Guéras, qui est doué d’une éloquence de député mer parle du pilotage. « Vous nous avez commandé le beau temps, me dit il, c’est depuis plusieurs mois les premières journées de calme ; en baie de la Frenay où nous nous trouvons en ce moment en ce moment est notre refuge quand l’ouragan fait rage. »
Il omet de me dire que le général Gallieni mouille seulement dans la baie lorsque son concours ne peut être d’aucune utilité aux navires ; alors même qu’il, fait dehors ce que les terriens nomment un temps de chien, les pilotes restent au large et c’est ainsi que chacun risque sans arrière pensées son existence. La « mise à bord » est surtout difficile quand le navire accosté est muni de « ceintures de défense « , bordure en bois dépassant de 25 à 30 centimètres la coque à la hauteur de la ligne de flottaison. Cette ceinture de défense peut alors, comme le cas s’est produit il y a deux ans à Belle-Isle chavirer le canot des pilotes, trois gardiens des côtes de l’océan succombèrent ainsi, victimes du devoir.
De la baie de la Frenay, l’on a un magnifique panorama de toute l’entrée de la rade. Guéras me nomme les cailloux et me signale en passant les multiples réclamations formulées, tant par les capitaines de navires que par les pilotes, toutes relatives à la Roche du Vieux-Banc portée sur les cartes marines à cinq milles du port sur les alignements des « haies de la Conchée vues un peu au sud de la pointe de la Varde » et de « la Grande-Roche des Portes vue par le bastion Saint-Philippe des fortifications de Saint-Malo » cette roche du Vieux-Banc découvre d’un mètre soixante et n’est signalée la nuit par aucun feu ; elle constitue un danger permanent pour la navigation et c’est bien volontiers que l’Ouest-Éclair, se fait l’interprète des pilotes et capitaines pour demander une balise éclairante.
Le Gallieni a mis me cap sur le large par cette fin de matinée qui semble vouloir se gâter, le soleil est en effet disparu et la visibilité a baissé ; à un moment, l’on aperçoit cependant très loin à l’est une fumée, l’on gouverne dans sa direction, mais en vain : C’est un caboteur qui se rend à Granville et il sera bientôt « servi » par les pilotes de cette station.
Jusqu’au soir, nous croiserons ainsi en pure perte : A l’horizon rien de nouveau ! Le seul intermède qui viendra rompre la monotonie de notre croisière sera la relevée des filets, une quinzaine de beaux lieus sont capturés, nous les dégusterons demain.
Sous la bourrasque
Les nuages menaçant de ce matin se sont rapprochés, l’horizon se brouille, le jour tombe rapidement. C’est un « coup de tabac » pour cette nuit. Confiants dans l’homme de quart et dans la solidité du cotre, nous dînons cependant. Avant de se calfeutrer dans les étroites couchettes, chacun raconte ses souvenirs : Legal, lui a préféré potasser les bouquins et les cartes dont la connaissance parfaite lui vaudra le brevet de pilote ; son compagnon est de quart.
Comment peut-on, à bord des navires, occuper les longues veillées ? Mes hôtes me l’apprennent en contant leur souvenirs d’antan… leur aventure de jeunesse. L’un de nos compagnons, je ne le nommerai pas, en a de nombreuses à son actif, ses exploits de jeunes homme, qui ne dépassent pas, bien entendu, certaines limites, sont pour lui une cause perpétuelle d’amicales plaisanteries de ses collègues, il les accepte d’ailleurs avec le sourire.
Après avoir pris une familiale tasse de thé, nous prenons quelques heures de repos. Peu habitué au tangage, je suis bientôt rudement tiré de mon premier sommeil par les flots déchainés, balloté dans ma couchette, mes épaules prennent un dur contact avec l’armature du cotre ; mes compagnons cependant trempés dans ce genre de sport ne peuvent eux non plus fermer l’œil.
Qu’importe, ce n’est pas l’ouragan qui empêche le service de mer, attendons patiemment l’accalmie. Le Gallieni est solide à son poste.
IV.
La tempête au large, le calme sur la côte
Escale à Saint-Cast
Impossible de fermer l’œil, les flots ne se sont point apaisés et interdisent de « tenir » dans les couchettes, aussi dès l’aube tout le monde est sur le pont. Rien toujours rien à l’horizon… Aucune fumée, aucune voile ne se devinent dans le petit jour qui se lève. Les pilotes décident de mettre le cap sur Saint-Cast pour y reprendre Ange Fromont qui l’on s’en souvient, avait rentré au port le Dorothy-Rose. La cote grossit rapidement, en même temps que, plus nous approchons, diminue la violence de la houle. On distingue les hôtels et les villas déserts en cette époque, de la coquette station balnéaire. Voici la station des Hospitaliers-Sauveteurs Breton dont le canot, toujours prêt à secourir le marin en péril, se trouve provisoirement à Saint-Malo. Le Gallieni mouille à quelques encablures de la côte et avec le canot du bord, nous nous dirigeons vers la cale d’accostage. Après avoir eu de longues heures les quelques mètres du pont pour tout terrain d’exercice, l’on éprouve un véritable bien-être à se dégourdir les jambes sur la terre ferme. Nous grimpons l’abrupte falaise castine ; ah ! ce n’est point le Saint-Cast des touristes ; les parasols aux claires couleurs, les blanches cabines de bain de la plage, les terrasses en fleurs, la joyeuse animation des vacances ont disparu, faisant place au Saint-Cast port de petite pêche.
Nous n’avons pas été longtemps à la recherche du « père Ange » , ancien pilote de Saint-Cast, à l’époque héroïque de la concurrence, il y a une coquette maison où il compte venir dans quelques années prendre une retraite bien gagnée.
Mais voici bientôt 72 heures qu’à bord du Gallieni, nous sommes retranchés du monde, que s’est-il passé durant notre absence ? Dans un dépôt de l’Ouest-Éclair nous achetons les derniers journaux qui hâtivement feuilletés par tous ; tout va bien […]
Enfin… un navire !
Nous avons regagné le bord et malgré le vent qui ne faiblit toujours pas nous prenons la direction du large. A peine une heure après le départ de la tranquille baie de Saint-Cast, l’homme de barre signale au loin un navire. D’après l’orientation de son panache de fumée, il vient droit sur nous, la voilure du cotre, cependant réduite en raison de la violence du vent, nous fait rapidement avancer vers la coque noire qui vient de l’est. C’est au tour de Puisné de conduire à bon port le vapeur ; vais-je l’accompagner ? J’avoue franchement n’être pas enthousiaste pour prendre place à bord du frèle canot, les vagues énormes qui déferlent sur le pont semblent me commander de rester prudemment l’hôte du Gallieni, les pilotes eux même me donnent se conseil… que je suis.
Nous approchons le plus possible du vapeur, le Broadgreen, un petit cargo anglais venant de Swansea, Puisné et Legal se détachent du bateau pilote et dans keur coquille de noix voguent péniblement vers le Broasgreen ; après de longues minutes qui nous semblent des siècles la manœuvre réussit et le pilote mettant à profit la seconde décisive saute à l’échelle de coupée.
Simple épisode de la vie des pilotes, qui se renouvelle des centaines de fois. Pas un seul instant Puisné n’a hésité à se rendre à bord, les marins accomplissent ainsi les actes les plus dangereux avec un mépris superbe du danger. Y pensent-ils seulement !
Très vite, le vapeur a disparu vers les passes et nous redescendons dans la « chambre » pour le déjeuner. Il faut tenir les plats et se garder de laisser un gobelet rempli, l’on mange sur le pouce, les pieds calés pour éviter d’être jeté d’un bord sur l’autre. Le « coup de tabac » se prolonge vraiment trop.
Comment le service est assuré pendant la nuit ?
Nous causons et j’apprends de mes aimables hôtes comment le service est assuré la nuit. Aucun navire n’est, en effet, venu jusqu’ici troubler notre sommeil. Nous n’avons pas eu l’occasion d’une manœuvre nocturne. Dès le coucher du soleil, un feu blanc est hissé en tête de mât et par intervalles, voici l’explication des lueurs que j’entrevoyais la nuit dernière de ma couchette, l’homme de quart brûle le « Flare Up », sorte de torche à essence d’une grande luminosité. Le navire qui désire l’assistance d’un pilote répond de la même façon. Quand il est a peu de distance, le navire pilote allume un feu rouge par bâbord ou par tribord pour indiquer « son cap » C’est ensuite la réédition de la manœuvre diurne.
Ce qu’il en coûte pour rentrer un navire
Avant la guerre (14-18) , les tarifs de pilotage, propre à chaque station, étaient à Saint-Malo de 0 fr. 20 par tonneau de jauge nette pour les vapeurs et de 0 fr. 40 pour les voiliers. Ces tarifs, malgré les frais nouveaux et croissants des pilotes (utilisation d’un moteur, achat de la vedette rapide Union, augmentation de 6 à 700% des diverses fournitures), n’ont point suivi le coefficient du coût de la vie puisqu’aujourd’hui les taxes sont de 0 fr. 755 pour les vapeurs et de 1 fr. 29 pour les voiliers, soit à peine comme l’on voit le coefficient 4. Je sais qu’à Saint-Malo-Saint-Servan la station a l’espoir de voir les travaux du nouveaux port augmenter de notable façon le tonnage. Mais ce n’est qu’un espoir. Signalons cependant en passant que la loi de 1928 a sérieusement amélioré le sort des pilotes en prévoyant une retraite non seulement aux hommes mais encore à leurs veuves et enfants. C’est là une des heureuses initiatives de la fédération nationale des Pilotes de France.
V.
Calme plat
Les vents de nord-ouest qui nous ont si furieusement secoué se sont apaisés, le ciel s’est purifié, la mer a retrouvé ses belles teintes bleues et vertes. Depuis deux jours, c’est le calme plat. Au lointain se profilent une vingtaine de fines voiles. Serait-ce une antique escadre de la « marine en bois » ? Mes hôtes ont vite fait de distinguer la nature de ces voiles : ce sont les rapides bisquines cancalaises qui viennent trainer leur chaluts. Nous les côtoierons tout à l’heure et de bon mots, la bonne humeur des marins ne perd jamais ses droits, seront échangé d’un bord à l’autre.
Toujours l’immensité du large, le pilote Fromont a profité de son passage au port pour voir les courtiers maritimes. Ceux-ci ne lui ont signalé aucun navire, hormis le vapeur « Député Josselin de Rohan », attendu de Rotterdam pour la fin de la semaine . Pour tuer le temps, on décide de tendre les filets, et sur le pont, ils sont préparé. L’opération de la pose des filets est vite effectuée et nous continuons a croiser au large. Aucun événement ne viendra troubler notre quiétude et s’est seulement le lendemain que le « Député Josselin de Rohan » demandera l’aide des pilotes.
En rade de la cité corsaire
C’est au tour de Guéras de rentrer le navire, le temps est toujours au beau et c’est sans une hésitation que j’accomplis avec le vieux pilote la manœuvre de la mise à bord. Un hâtif « au revoir » et Guéras et moi nous sommes sur les tôles du pont du vapeur. La courtoisie est une des qualités des marins et une fois de plus, je puis constater à la reception aimable du capitaine du « député Josselin de Rohan ».
Sa traversée s’est fort bien faite et aucun incident n’est venu la troubler. Il nous indique le tirant d’eau de son bâtiment, malheureusement trop élevé pour lui permettre , en cette période de morte-eau de rentrer au port. Il devra attendre 48 ou 60 heures sur rade pour être éclusé vers le bassin. Ce cargo est le seul français que la bordée de semaine entrera, est un beau navire d’une jauge de 1184 tonneaux. Il amène à Saint-Malo une cargaison de charbon.
La côte se rapproche rapidement et, bien que la vitesse soit réduite, le navire laisse, après trois quarts d’heure de route , l’ancre tomber à quelques centaines de mètres des farouches fortifications qui perpétuent dans la cité corsaire le souvenir de Vauban. Le rôle du pilote de mer est terminé, le navire sera rentré par la bordé de veille dont le pilote viendra à bord du navire sur la vedette Union. Très obligeamment le capitaine du « Député Josselin de Rohan » met à notre disposition un canot pour nous conduite à la cale de Dinan à Saint-Malo. Notre croisière est terminée. Demain à la première marée, le Gallieni sera de retour dans l’anse de Solidor où il prendra la nouvelle bordée de mer.
Dans ce trop rapide coup d’œil sur la rude vie des pilotes de nos côtes j’ai tenté de retracer aussi exactement que possible les dangers continuels qu’ils encourent. En vivant pendant quelques jours l’existence de ces courageux marins, j’ai tenté, ai-je réussi ? Il est des sentiments, des impressions, des craintes aussi que nulle plume, même de beaucoup plus autorisées que la mienne ne saurait l’atteindre.
Charles Beunet
Sources :archives de l’Ouest Éclair
« Bateaux des côtes de Bretagne Nord » de Jean le Bot
Solidor Team Sailing qui fait naviguer le cotre Iseult
Pour commencer une série d’articles sur les pilotes de Bretagne Nord, voici en guise d’introduction un liens sur un document décrivant l’évolution du contexte législatif du pilotage depuis l’ancien régime jusqu’à la loi du 28 mars 1928 établissant les base du fonctionnement du pilotage maritime actuel : Muriel Thoin, L'évolution de la législation relative au pilotage (Société Française d’Histoire maritime)
Derrière l’appellation pilote se cache plusieurs métiers :
Le pilote hauturier : à bord des vaisseaux marchand navigant au long-cours ou à bord des navires de la marine royale, le pilote hauturier fait le point et la route du navire.
Au XVIIIème siècles les officiers du bord augmentent considérablement leur compétence dans le domaine de la navigation et cette fonction tant à disparaitre , elle sera supprimée à la révolution.
Le pilote côtier : à bord des navires de guerre, petits et grand, en fonction du besoin, le capitaine choisit en fonction de ses connaissances de la côte un homme d’équipage , souvent maitre au cabotage, pour devenir pilote côtier et l’assister pour les atterrages. Cette fonction a été particulièrement utile, pour se refugier dans tous les mouillages possible de la côte, lors du blocus maritime de la France sous le révolutions et le premier empire.
Le pilote de la flotte : l a marine nationale institutionnalise, cette fonction de pilotage en créant en 1878 cette spécialité d’officier marinier, expert en navigation côtière. St Servan abritera l’école de pilotage de la marine.
Le pilote lamaneur : La fonction du pilote lamaneur est de guider les navires à l’entrée et à la sortie des rades, des ports, des estuaires, des rivières et autres mouillages. Le pilote lamaneur, attaché à une station, correspondant à un secteur de la côte, prend en charge le navire à partir de sa montée à bord jusqu’à la mise en lieu sur.
C’est à ces nombreux pilotes lamaneurs de Bretagne Nord que nous allons consacrer une série d’articles.
Pour les pilotes de Saint-Malo et des environs je vous conseille la lecture de l’excellent livre de Jean-Luc Blaise et Jean le Bot « pilotes et pilotages en baie de Saint-Malo au temps de la voile » édité en 2010 aux éditions Cristel